Entre Tron, premier film à utiliser l’image informatique au cinéma, et le duo parisien qui décida un jour de se métamorphoser en robots, la rencontre paraissait inévitable. Retour sur deux circuits faits pour s’intégrer l’un à l’autre.
La nouvelle tombe vers la fin de l’année 2008 : Daft Punk vient de signer avec les studios Disney pour réaliser la bande originale de la suite du film Tron, sorti en 1982 et réalisé par Steven Lisberger.
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C’est une bonne surprise mais au final pas vraiment une surprise. Les Daft Punk n’auraient-ils pas – au moins dans leur tête – déjà réalisé la BO de Tron depuis quelques années ? L’histoire est d’une effroyable et redoutable cohérence – et elle prendra tout son sens lors de la sortie de ce nouveau Tron, le 9 février 2011.
En 1999, les Daft Punk deviennent des robots
Voyez plutôt : le 9 septembre 1999, Thomas Bangalter et Guy-Manuel de Homem-Christo annoncent via un communiqué de presse qu’ils deviennent des robots – à quelques mois de la sortie de leur deuxième album Discovery.
Depuis son premier album Homework (en 1997), le groupe a été plus qu’avare en apparitions. Bangalter et de Homem-Christo ne se sont montrés dans aucun des clips de ce premier essai, confiés à Spike Jonze (Da Funk), Michel Gondry (Around the World) ou encore Roman Coppola (Revolution 909).
Après la sortie de Homework, les photographies du groupe se font de plus en rares. Pour la mise sur orbite de Discovery, disque ultramédiatisé, ils passent la vitesse supérieure – ils se “robotisent” pour mieux disparaître.
“Nous trouvons nos nouvelles têtes plus belles que nos têtes humaines. Les robots sont beaucoup plus amusants que nous sur la couverture des magazines”, explique Thomas Bangalter aux Inrockuptibles.
Les Parisiens apparaissent ainsi pour la première fois dans cette tenue de robot qui était encore la leur lors de leur dernière apparition publique pour le concert de Phoenix au Madison Square Garden en octobre dernier. Des casques d’acier sont désormais en permanence vissés sur leur corps.
Tron et Daft Punk, une filiation évidente
On ne se souvient alors plus du film Tron, sorti il y a près d’une vingtaine d’années, mais la filiation semble pourtant évidente. Comme les deux Daft Punk, le héros malgré lui de Tron (Kevin Flynn, joué par Jeff Bridges qui deviendra plus tard le “Dude” de The Big Lebowski des frères Coen) se digitalise et pénètre le coeur de la machine – à moins que ce ne soit la machine qui ne pénètre son coeur.
Chez Daft Punk comme dans Tron, les diodes, les epoxys, les électrodes et le Kevlar envahissent progressivement la peau pour célébrer les noces de l’homme et du computer. C’est à la fois moderne et étrange, culotté et un rien glacial, mais un espoir fou dans le futur sous-tend ces noces folles et complexes. L’imaginaire ? On pense bien évidemment aux dessins animés de l’enfance (Goldorak, Ulysse 31, Albator, Capitaine Flam), aux romans d’anticipation (Asimov, Bradbury, Philip K. Dick), aux films de science-fiction (de Stanley Kubrick à Cameron).
Dans cette fuite en avant électronique, cette quête digitale, il y a les fantasmes du jeune garçon qui ouvre intrigué – et le tournevis sur l’oreille – le capot de son Commodore, de son ZX Spectrum ou de son Atari. Tron et Daft Punk, c’est une fascination pour la machine, l’envie de rentrer dedans pour explorer ces milliers de codes binaires qui tracent et façonnent un univers aussi passionnant qu’impalpable. C’est l’aventure de demain, celle que l’on pourrait presque vivre de sa chambre d’ado grâce aux nouvelles combinaisons offertes par la technologie.
Une robotisation qui accompagne un son métallique et mélancolique
Avec Discovery, son deuxième album au titre évocateur, Daft Punk démontre son envie d’entreprendre ce périple, avec tous les risques et les renoncements qu’il peut comporter. S’éloigner de l’homme pour rejoindre la machine et en pénétrer les circuits, c’est le cheminement à la fois déterminé et mélancolique que semblent décrire certains titres du disque. On pense à l’horizon trouble de Night Vision, aux envolées d’Aerodynamic, Voyager qui annonce le grand départ, aux étranges danses électriques de Short Circuit, ou encore à Veridis Quo, formidable hymne par défaut, idéal pour regarder décoller fusées et vaisseaux, la gorge serrée.
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