Au premier abord, comparé à ses prédécesseurs gargantuesques, London Calling et Sandinista, Combat Rock fait un peu office de ration maigre, de disque anémique : le groupe semble avoir laissé loin derrière les débordements et la frénésie du passé pour se concentrer sur un disque plus ramassé, comme taillé pour les radios et les stades […]
Au premier abord, comparé à ses prédécesseurs gargantuesques, London Calling et Sandinista, Combat Rock fait un peu office de ration maigre, de disque anémique : le groupe semble avoir laissé loin derrière les débordements et la frénésie du passé pour se concentrer sur un disque plus ramassé, comme taillé pour les radios et les stades par la production de Glyn Johns (producteur des Who, des Faces et des Rolling Stones). Combat Rock a longtemps été perçu comme un disque de « vendus », notamment parce qu’il a été le premier album du groupe à connaître un indéniable succès commercial, propulsé par le single Rock the Casbah. Un autre morceau de l’album, Should I Stay or Should I Go, officiera longtemps comme l’hymne indépassable du Clash et sera, quelques années après la séparation, un tube posthume sous la forme d’une pub télé pour Levi s.
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Moins monolithique que le voudrait la légende, Combat Rock s’écoute, un peu plus de vingt ans après son enregistrement, comme un étonnant disque de fête, ludique et frénétique, rempli dans l’ensemble de morceaux qui sont autant de tubes faits pour danser : le Clash y passe en revue plusieurs genres, du boogie au funk, sans oublier la new-wave synthétique ou le hip-hop. Combat Rock montre un groupe qui maîtrise de plus en plus son art et ses objets de prédilection. La complainte tiers-mondiste de Straight to Hell, sorte de slow pour boat-people abandonnés, les travellings urbains de Ghetto Defendant, Red Angel Dragnet qui cite explicitement le monologue apocalyptique de Robert De Niro dans Taxi Driver : autant de thèmes qui assoient clairement le Clash comme un groupe en prise avec son époque, débarrassé des envies kaléidoscopiques qui boursouflaient parfois ses disques précédents.
Malgré tout cela, pourtant, Combat Rock manque souvent de la tension qui habitait les autres disques du groupe : une tension entre la naïveté pop de l’écriture de Mick Jones et le sens politique presque épique de Joe Strummer. Combat Rock, dans ses interstices et ses moments creux, met en scène un groupe qui commence à se prendre trop au sérieux, qui passe de l’insouciance de Rock the Casbah à l’ennui presque mortel de Inoculated City et Death Is a Star, derniers morceaux de l’album. A la fin des sessions, le groupe vire son batteur Topper Headon, accusé de trop se défoncer, puis part en tournée avec les Who : la fin d’une époque et le début annoncé de la vieillesse, la pire des insultes pour n’importe quel punk.
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