The ByrdsCoffret cbs Patti Smith expliqua un jour que son adolescence était si nulle que la seule chose qui l’empêchait de se suicider, c’était la pensée de rater le prochain single des Stones. Il en va de même de ma relation avec les Byrds durant toute la seconde moitié des sixties. De l’été 65 où […]
The Byrds
Coffret
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Patti Smith expliqua un jour que son adolescence était si nulle que la seule chose qui l’empêchait de se suicider, c’était la pensée de rater le prochain single des Stones. Il en va de même de ma relation avec les Byrds durant toute la seconde moitié des sixties. De l’été 65 où ils ensorcelèrent pour la première fois le monde avec Mr Tambourine man à l’automne 68, après Sweetheart of the rodeo, lorsqu’ils devinrent Roger McGuinn et un groupe derrière , les Byrds ne déçurent jamais la folle confiance du fan.
Miles Davis leur trouva leur premier contrat avec une maison de disques et la mère de Lenny Bruce leur dénicha leur premier concert : dès le début, les Byrds bénéficièrent des cautions les plus cool qui soient, comme ils écopèrent aussi du plus explosif assemblage de personnalités qu’un groupe majeur ait connu dans les sixties. Personnalités toutes étonnamment talentueuses : l’écriture folk-rock quasi stoïcienne de Gene Clark, les harmonies innovatrices de David Crosby et ses vifs penchants jazz, la basse bluegrass relax essentielle de Chris Hilmann. Autant d’éléments miraculeusement assortis et fusionnés dans le jingle-jangle fondamental de la guitare de Roger McGuinn. Ensemble, et même après qu’ils ont commencé à s’essouffler quelque peu, les Byrds furent les plus géniaux visionnaires de leur pays et de leur culture, les alchimistes soniques les plus audacieux ? et élégants ? des sixties.
C’est cependant plus que l’envie de s’abandonner à de vieux souvenirs aimés qui nous incite ces jours-ci à écouter sans cesse la majorité des 90 titres ? sept années de carrière ? de cette compilation adorablement conçue : ces chansons n’ont pas une ride, d’autant plus que chacune a été radicalement nettoyée et la plupart du temps remixée. De façon que telle ravissante texture, telle harmonie inouïe à peine audibles sur le vinyle s’épanouissent ici en grand, dévoilant une nouvelle résonnance, une profondeur inédite à la musique des Byrds, aussi raffinée et étrangement contemporaine que jamais, résolument éclectique et pourtant résolument retenue. Aussi vitale que soit leur musique, les conflits à l’intérieur du groupe s’y reflètent pourtant de façon aiguë. La carrière des Byrds a été marquée par moult frictions, intérêts perso et coups de couteau financiers dans le dos, toutes sortes de vilains griefs mesquins qui aboutirent à ruiner une première tentative de réunion en 73. C’est pourquoi cette compilation est un tel plaisir : tout le monde est là, les choix effectués sont presque toujours les bons et, même si le meilleur se trouve en fait sur les deux premiers compacts (de 65 à 68 inclus), le reste n’en incite pas moins à reconsidérer la période qui vit les Byrds de McGuinn porter seuls la flamme après la fin des années réellement magiques.
Roger McGuinn décrivit un jour les Byrds comme un magazine musical dont il serait le rédacteur en chef. C’est de cette façon qu’il a conçu cette compilation, qui le dépeint certes comme le seul permanent du groupe, mais qui ne l’autorise jamais à s’octroyer pour lui seul la lumière, harmonieusement dispatchée sur des membres initialement laissés pour compte, notamment David Crosby et Gram Parsons. Sait-on assez que le premier cité, avant de devenir la caricature de hippie drogué que l’on connaît, était l’un des plus doués de ces volatiles, dont l’influence jazz déterminante commence dès Eight miles high, hymne définitif à la défonce béate ? McGuinn, pour redonner une idée honnête des rapports de chacun, a bousculé l’ordonnance des albums, écartant les titres faiblards pour en rajouter d’autres initialement oubliés. Les inédits de Sweetheart of the rodeo, avec les vocaux jadis prétendument perdus’ de Gram Parsons s’avèrent les véritables pépites de la collection : pas tant les titres jamais entendus auparavant (un indispensable Reputation et un puissant Lazy days) que les versions admirablement restaurées de You don’t miss your water, One hundred years from now et surtout The Christian life. Le fait de pouvoir ici passer d’une chanson prônant le sexe à trois (Triad) à cette dernière, qui prêche les bienfaits du fondamentalisme, sans que le groupe y perde un iota de crédibilité, ne fait qu’attester encore de la pérennité de son unique intégrité musicale. Aussi, on reste stupéfait de la vitesse et de l’efficacité avec laquelle les Byrds embrassèrent et épuisèrent leurs influences, du folk-rock de Bob Dylan et Pete Seeger au raja-rock de John Coltrane, en passant par l’invention du psychédélisme (Eight miles high) et celle de l’acid-rock (Younger than yesterday), jusqu’au bucolique country-rock, le tout en trois petites années.
Après 68, McGuinn n’exploita plus que la veine folk-rock : les deux derniers compact, véritable jungle de titres dont beaucoup inédits, pâtissent évidemment de leur présence à côté du reste,
même si des moments comme Chestnut mare
égalent n’importe laquelle des plus belles réussites du groupe. La compilation s’achève avec la réunion de trois Byrds pour six morceaux (laissez
tomber les deux en public et prenez plutôt
Paths of glory et le From a distance de Hillman) résumant impeccablement l’entreprise. On pourra leur en vouloir d’avoir ici exclu Gene Clark mais,
au total, voici du définitif ? ou presque.
Les puristes peuvent se prélasser à l’envi dans la splendeur 3d de ces 4 cd d’un groupe qu’ils aimaient depuis longtemps, mais les touristes et les jeunes lecteurs de ce journal n’ont aucune raison de se sentir exclus du club : avec cette compilation,
on comprend vite pourquoi les groupes préférés,
de rem à Ride, essayent tous d’atteindre les mêmes altitudes.En vain : personne, jamais, n’a pu voler
aussi haut que les Oyseaux.
Nick Kent
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