De l’émouvante prestation de Rodriguez à la dubstep de James Blake, du live magique de Disclosure au show correct des Red Hot, récit de la troisième et dernière soirée du second week-end au festival Coachella à Indio, en Californie.
Jour 3
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Trois jours de poussière, de traces de marcel disgracieuses et de photos de l’emblématique grande roue de la plaine d’Indio. Trois jours de rencontres polies à l’américaine, de francs coups de coudes et d’effluves de marijuana. Mais surtout trois jours de musique intensifs, où s’enchaînent heure après heure des concerts tous plus immanquables les uns que les autres. C’est ça aussi Coachella: un planning ultra-serré qui impose soit d’être doté du don d’ubiquité (nous n’avons pas cette chance), soit de faire des choix. Difficile. Un peu comme dans Motus, une chance sur six de tomber sur la boule noire.
Particulièrement en ce dimanche (à dominance british) et dernier jour de l’édition 2013 de Coachella, où se superposent en une grosse heure à peine les sets de James Blake, Rodriguez et Tame Impala. Pas le temps de se remettre des vocalises ultra-maîtrisées de Jessie Ware, charmeuse et clairement déterminée à conquérir les ondes outre-Atlantique. Ni même le loisir de siroter une noix de coco après le show captivant de la charmante Grimes, prêtresse barrée de l’électro-pop japonisante. L’instant est à la synchronisation des montres. Top. Départ.
Un passage express du côté du bien nommé Sahara présente un Paul Kalkbrenner sous dopamine, suintant mais apparemment aux anges de lâcher ses beats au public clairsemé du chapiteau. A quelques mètres de là, l’ambiance décélère alors que James Blake s’installe face à sa pédale loop et balance sa dubstep éthérée, calmement, prolongeant les préliminaires jusqu’à la montée en puissance d' »I Never Learnt To Share », puis en invitant tranquillement RZA à prendre le mic sur « Take A Fall For Me ». Déplacement latéral vers la tente « Gobi ». Fatigué, mais visiblement heureux, Rodriguez fait des blagues sur Mickey Mouse entre deux morceaux. A soixante-dix ans, l’homme semble réaliser un rêve de gosse en se produisant dans le désert californien et partage son bonheur généreusement. Touchant.
Trop tard pour les chevelus de Tame Impala. Qu’importe, les Vampire Weekend prennent le relais, face à une plaine monstrueusement remplie se dandinant en rythme à perte de vue. Une sorte de flash mob gigantesque au son popesque de « Diana Young » ou « Holiday ». Joli teasing pour la sortie imminente de leur troisième album.
Le week-end s’essouffle, mais les membres du Wu-Tang Clan en grande forme reviennent faire décoller les décibels. Clamant haut et fort leur amour pour la West Coast, le collectif de New-York s’époumone majoritairement sur des extraits de leur album mythique Enter the Wu-Tang: 36 Chambers, face à une assemblée ultra-compacte. The Wu ain’t nothing to fuck with!
Set et match. Le grand final de Coachella est offert aux Red Hot Chili Peppers (pour la troisième fois) qui s’adonnent à un concert taillé pour les stades, rythmé, soutenu, rempli de tubes, mais sans surprise. Un bonheur à l’état brut pour les fans, un bande son agréable pour les autres. C’est du côté de Disclosure que les festivités deviennent jouissives. Les deux anglais livrent un set d’une rare intensité, maniant batterie, chant, basse et iMac d’une dextérité impressionnante. Et si la collaboration avec AlunaGeorge, « White Noise », fait grimper la température et que la venue de Jessie Ware sur scène fait tomber les tee-shirts, c’est le morceau de clôture, « Latch », en total live grâce à la performance de Sam Smith qui a allumé les poudres pour former l’un des plus beaux feux d’artifices musical du festival. Finalement, il n’y aura pas eu de boule noire dans cette loterie Coachellienne.
Jour 2
Coachella, c’est un peu le Kinder des festivals: dans chaque concert peut se cacher une surprise. Un peu pourrie ou complètement géniale, au choix. La semaine dernière, les festivaliers ravis ont ainsi pu applaudir John Legend, venu pousser des vocalises pour les besoins du set de Benny Benassi. Mais ils ont surtout vu débarquer… R.Kelly en clôture du concert de Phoenix alors qu’une rumeur insistante assurait la venue de Daft Punk en « special guests ». Triste désillusion.
Malgré tout, ce samedi du second weekend de Coachella, le public optimiste (et bien plus nombreux que la veille) pariait toujours sans sourciller sur la venue des deux casqués en grand final de Phoenix. Pas de bol, cette fois-ci ni R.Kelly, ni les Daft Punk, ni même personne d’ailleurs, ne fait le déplacement pour agrémenter le show des Versaillais. Qu’importe, le groupe accueilli comme le messie par une plaine remplie à craquer, réussit (encore!) le pari de faire danser des dizaines de milliers d’américains survoltés, enchaînant Consolation Prizes, Too Young ou Lasso, sans jamais s’essouffler. Sauf peut-être en rappel, quand Thomas Mars se décide à plonger dans la foule pour profiter d’un des plus longs crowd surfing de l’histoire, emberlificoté dans le fil de son micro.
Si les Daft Punk n’ont pas daigné se montrer sous le soleil de plomb du désert californien, d’autres guests assurent le spectacle. Exemple avec les Fall Out Boy, débarqués de nulle part pendant le set étouffant mais jouissif de 2 Chainz, pour repartir aussi vite. Épongé après sa performance bouillante sous la bien nommée tente Mojave, le rappeur se décide lui aussi à rejoindre les géniaux Major Lazer sur scène quelques heures plus tard, pour continuer à faire suer les festivaliers très excités par le coucher du soleil et l’électro-reggae du projet de Diplo et ses remixes de Get Free, du fameux Harlem Shake de Baauer et de Diamonds de Rihanna.
La surprise de Bat For Lashes, quant à elle, se résume simplement à l’entièreté de son concert. Magnétique, la décalée Natasha Khan fait respirer d’un seul souffle l’assemblée pendant les cinquante minutes de sa prestation, de sa voix enveloppante. Même son de cloche du côté du show des Grizzly Bear, qui livrent d’emblée leurs meilleurs morceaux sous une dizaine de lampions flamboyants, alors que sur la Main Stage, les geeks de Hot Chip célèbrent l’anniversaire de leur leader, Alexis Taylor, en distillant les bonnes vibes de leur pop dansante.
La soirée se termine doucement mais sûrement grâce aux beats glacés mais splendides du trio de The XX, qui s’humanise un instant en annonçant d’un sourire sincère qu’ils réalisent un rêve en jouant à Coachella. Malgré la foule compacte, Oliver, Romy et Jamie nous transportent individuellement dans leur bulle éthérée. Sans compter les quelques greluches qui pensent écouter du David Guetta et se remuent frénétiquement en rigolant comme des poneys. Du côté du chapiteau Gobi, autre ambiance: Janelle Monae et son crew de musiciens s’y éclatent dans un show détonant, mixant allègrement r&b, soul et funk pour obtenir un mélange très motown et chaloupé. C’était une belle journée.
Jour 1
Après quelques heures de route dans le désert californien et ses maudits embouteillages, un système de navettes ultra-rôdé un rien contraignant et plusieurs barrages de sécurité anti-drogue/eau/nourriture/bombes, s’ouvrent enfin les portes vers le Saint-Graal made in USA: le second weekend de l’édition 2013 du festival Coachella.
Pourtant, ça semblait mal embarqué: à l’annonce du line-up de ce festival mythique en janvier dernier, les cris de déception se comptaient par milliers sur Twitter. Rappelez-vous, l’an dernier, Snoop Dogg y partageait la scène avec l’hologramme de Tupac. Difficile de maintenir un tel niveau. Qu’importe, les 75.000 festivaliers de ce vendredi 19 avril sont au rendez-vous sur la plaine d’herbe brûlée par les 35 degrés ambiants. Qui dit chaleur étouffante dit tenues affriolantes: pas de complexes pour les Américaines qui se trimballent en total look bikini/mini-short à l’affut du prochain street style ou de la meilleure photo à poster sur Instagram.
A peine le temps d’enfiler le bracelet qui permet à tout adulte de plus de 21 ans de consommer de la mauvaise bière (et de saluer Jessica Alba qui se promène dans les environs) que Metric monte sur scène. Avec la petite soixante-dizaine de groupes programmés en ce seul premier jour, flâner semble proscrit. La captivante Emily Haines enveloppe, doucement mais sûrement, la foule massée face à la Main Stage qui se réveille en se chaloupant sous le soleil pesant. Du côté du chapiteau Mojave, bouillonne une assemblée de hipsters en attente des quatre anglais d’alt-J. Plus aguerris qu’à leurs premiers lives, les membres décollent sans jamais redescendre et offrent un voyage de première classe aux curieux grâce à Tessellate ou Matilda. Bon point.
Alors que s’égosille Michael Angelakos de Passion Pit en sautillant comme une chèvre de montagne, l’électro enivrante de Four Tet retentit dans la très VIP tente Yuma. File énorme, cagnard: changement de programme. Les Local Natives, ravis de s’offrir un concert sous le coucher de soleil de Palm Springs, délivrent des seaux de fausses notes sans oublier de sourire. Après des TNGHT trop bourrés pour livrer un set correct, les Yeah Yeah Yeahs ravissent et les Stone Roses… s’amusent sur cette Main Stage qui leur était hostile (les américains leurs auraient préféré un certain Kanye West).
Puis viennent les Foals, à moitié dedans mais toujours aussi attrayants grâce à la fougue de Yannis Philippakis et à la ferveur de ses fans, qui applaudissent à chaque raclement de guitare. Vient le tour du grand final: Damon Albarn et ses comparses de Blur, qui font souffler un vent de nostalgie sur la plaine refroidie dès Girls and Boys. Sans pour autant convaincre la masse, rassemblée devant les dinosaures géniaux de Jurassic 5. A quelques mètres, Earl Sweatshirt s’époumone malgré un micro pourri et ramène sur scène son pote d’Odd Future, Tyler the Creator, pour assurer le show. Et ça marche. De quoi se requinquer avant de filer… au parking.
Marie Frankinet
{"type":"Banniere-Basse"}