En pause depuis quatre ans, les Américains de Clap Your Hands Say Yeah brisent leur silence avec un troisième album faussement serein. Critique et écoute.
On se souvient parfaitement de cette journée bénie où, lors d’un banal voyage en train, on a redécouvert le premier album de Clap Your Hands Say Yeah. C’était en 2006, et le disque hantait déjà nos nuits depuis sa sortie l’année précédente. Il nous avait laissé un peu ahuris, mais n’avait pas encore révélé toute sa grandeur. Ce jour-là, il a pris une tout autre ampleur, en sautant à la gorge. Mystérieusement, la batterie mécanique s’est fondue dans le ronronnement monotone de la locomotive, la voix de craie d’Alec Ounsworth, dans les sifflements du chef de gare. Les guitares se sont transformées en grincements de rails rouillés, la basse, en cliquetis des portes qui s’ouvrent, qui claquent. Tout s’est avéré évident, parfait : un album taillé pour le mouvement.
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“J’ai essayé de ne pas trop réécouter le nouvel album depuis que nous l’avons terminé, mais peut-être qu’il sonne comme un voyage en train, lui aussi. Ou comme un voyage en avion cette fois-ci”, lance, dans un rire, Alec Ounsworth, leader du groupe. Si l’Américain a été plutôt productif ces dernières années avec son side project Flashy Python et son premier album solo, on ne peut pas en dire autant de Clap Your Hands Say Yeah, dont l’interminable pause depuis la sortie de Some Loud Thunder en 2007 ne présageait rien de bon. C’était compter sans le nouveau souffle que cette coupure, qui a bien failli se terminer en rupture, a donné au groupe. “Cette pause était nécessaire et plutôt logique, explique Ounsworth. D’autant plus que, maintenant que nous nous sommes retrouvés, on comprend beaucoup mieux ce que nous sommes en tant que groupe. Je crois qu’on a beaucoup plus de respect pour ce projet. On ne le prenait pas vraiment au sérieux jusqu’à présent, le premier album n’était qu’un accident après tout !”
Un accident, Hysterical est loin d’en être un, contrairement à son illustre aîné de 2006. Enregistré dans la ferme d’Ounsworth près de Philadelphie, aux côtés du producteur des Walkmen, John Congleton, ce troisième album a été mûrement réfléchi, monté et démonté à maintes reprises par l’ensemble du groupe – “un processus beaucoup plus cohérent”, souligne Ounsworth.
Moins immédiat et moins nerveux que les albums précédents, Hysterical est un faux calme, une mer d’huile qui cache la prochaine tempête (Hysterical et Maniac, qui portent toutes deux bien leur nom). Conçu pour le live, ce nouveau rejeton dissimule derrière des titres d’apparence plus sereine et un son bien plus colossal qu’auparavant son impétuosité, son côté instinctif, tortueux (Yesterday, Never ; Adam’s Plane). On peut oublier le train : Hysterical sera la BO de notre prochain voyage en fusée, au moins.
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