L’Américain Chris Garneau continue d’explorer la voie d’un songwriting ultra-intimiste, dans un album plus orchestré.
A l’époque de son premier album, Music for Tourists, il s’était trouvé quelques critiques pour accuser Chris Garneau de n’être qu’un ersatz de Sufjan Stevens, une version courte sur pattes de l’auteur surdoué de Michigan ou Illinoise. Sur le plan de l’écriture, il est clair que Garneau est moins armé et ingénieux que son prestigieux collègue : sa boîte à couleurs harmoniques n’est pas aussi riche, ses lignes mélodiques sont assez prévisibles, ses arrangements relèvent plus de l’art ornemental que du génie de la composition.
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Mais la comparaison est-elle pertinente ? Stevens et Garneau, malgré quelques airs de famille (la voix fluette, le piano toujours à portée de doigts), n’ont pas du tout la même approche. Le premier aime brasser des concepts, des thèmes et des impressions pour mieux les convertir en pure musique. Chez Garneau, la musique est à l’inverse moins une fin qu’un moyen : elle est cet outil voué à mettre en forme ses confessions et ses états d’âme.
Rompant avec le minimalisme monochrome de Music for Tourists, El Radio claironne certes de hautes ambitions, imposant casting orchestral, découpage en quatre tableaux, grande variété de dynamiques, jolies trouvailles sonores. Mais il reste une entreprise de mise à nu, un exercice de strip-tease sentimental : un registre casse-gueule que le New-Yorkais, plus joueur que par le passé, investit avec une belle maîtrise, et dans lequel seul Antony semble en mesure de lui faire concurrence. Assumant ses flirts avec le pathos (en ouverture, The Leaving Song ne le réconciliera pas avec ceux qui le qualifient de pleurnicheur), Chris Garneau, partisan d’un lyrisme à coeur ouvert tout en frémissements, se pose crânement en porte-drapeau d’une nouvelle école de songwriting : celle de l’intimisme extrémiste.
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