Trois Parisiens unis par un rock abrasif, mal luné et au poil.
Un groupe français qui fait ses classes sur les routes américaines ne peut être qu’admirable. Surtout quand sa musique s’attaque aux racines du punk, du garage rock et de l’électronique crasseuse, trois domaines dans lesquels les Américains peuvent se permettre de jouer les difficiles. Après des tournées à se frotter à Pere Ubu, aux Slits, à Animal Collective ou aux Black Lips et une poignée de singles sur des labels US, les trois Parisiens livrent un premier album primitif, râpeux, mal léché, qui retrouve l’essence du rock, en y mettant le feu.
Leur simplicité découle d’une instrumentation sponsorisée par l’amicale des vide-greniers : synthés cheap et crados, boîtes à rythmes programmées par un simplet, copies de vieilles guitares décapées à la toile émeri et micro de récup mal nettoyé qui ne laisse passer qu’une voix comme massacrée par un mégaphone.
Qu’importe, car le chanteur ne cherche pas à décrocher une place de crooner dans un casino américain, vu que ses modèles sont plutôt du côté de Mark E. Smith (The Fall), du Colin Newman (Wire) des débuts, ou de David Thomas (Père Ubu). Chez Cheveu, il y a aussi du punk primitif à la française (Warum Joe) mélangé à du nihilisme à l’américaine (de Suicide à Shellac), avec quelques éclairs de guitare comme ressurgis du delta du Mississippi (Dog ou les neuf minutes d’Unemployment Blues).
Et parfois aussi un poil d’apaisement, comme dans ce Happiness tout juste armé d’un synthé et d’une voix inspirée par des répliques du film de Todd Solondz. Du rock brut et même pas gras pour ce Cheveu mal peigné, revêche et qui dégage bien les oreilles.