Champion in the arena 1976-1977

La réhabilitation de Jackie Mittoo restitue au mot un peu de son éthique. Qui était Jackie Mittoo ? Recruté par les Skatalites, il endossa à 15 ans un des premiers rôles dans l’élaboration du son jamaïcain aux côtés d’Ernest Ranglin, de Don Drummond et de Tommy McCook. Equivalent caribéen de Booker T. Jones, il introduisit l’orgue électrique dans les studios de Kingston, notamment le Studio One de Coxsone Dodd. Sa polyvalence finira par convaincre Coxsone d’en faire le régisseur musical de cette ruche qui, entre 1967 et 1975, produisit d’énormes quantités de miel sans que jamais la qualité en soit affectée. Si Mittoo conduisit nombre d’enregistrements du label, il n’était pas rare qu’il en réalisât aussi les arrangements, les lignes d’orgue ou de piano électrique. La musique des Wailers, des Heptones, des Gladiators, celle du Burning Spear du début des années 70 portent son empreinte élégante. Son opiniâtreté accentuant une nature effacée, exceptionnelles furent les occasions où Mittoo brilla pour lui-même.

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Cet album, constitué de séances post-Studio One réalisées avec les meilleurs (Sly & Robbie, Chinna Smith, Cheffrey Chung, Skully Simms’), confirme l’idée que l’égoïsme devient vertu quand s’y adonnent d’authentiques altruistes. Les rayons s’échappant de son Hammond ont l’action douce et irradiante d’un soleil caché. Sly Dunbar est au sommet de sa fantaisie rythmique, Robbie Shakespeare de ce stoïcisme de golem de la basse. Sur des thèmes déjà visités comme Hot Milk en version ralentie ou cet énième détournement de Norwegian Wood, Jackie Mittoo peint des ambiances à la torpeur béate, sculpte des intervalles de temps en pleine dilatation euphorique, et écrit l’une des plus belles pages de la musique instrumentale jamaïcaine.