Maintenant qu’il a vaincu son pire ennemi l’excès de confiance , Neil Hannon peut offrir à sa Divine Comedy son disque le plus dantesque. Il existe, au centre de la discographie abondante du collectif gréco-mongol Rondo Veneziano, une punition sonore et olfactive intitulée Casanova. Que les choses soient d’emblée entendues : c’est […]
Maintenant qu’il a vaincu son pire ennemi l’excès de confiance , Neil Hannon peut offrir à sa Divine Comedy son disque le plus dantesque.
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Il existe, au centre de la discographie abondante du collectif gréco-mongol Rondo Veneziano, une punition sonore et olfactive intitulée Casanova. Que les choses soient d’emblée entendues : c’est là l’unique point commun entre le nouvel album de Divine Comedy et cette bouse infâme. Précision nécessaire lorsqu’on sait qu’a souvent pendu au nez de Neil Hannon cette accusation de tirer un peu trop sur le moelleux des cordes et de surenchérir dans le barrococo jusqu’aux extrêmes limites de l’acceptable. On laissera donc ici les gogols à Venise, pas mécontent de tenir enfin le disque que l’on espérait pour succéder dignement à Liberation en passant outre le décorum pour cartophiles et touristes en short qui donne sa trame à l’album. Reconsidéré avec presque deux années de recul, Promenade porte admirablement son titre : on crut à ce moment précis que Neil Hannon se laisserait balader définitivement par son propre génie incontestable , qu’il finirait à force de complaisance par plonger dans l’autoparodie la plus grotesque. Là, le spectre Rondo Veneziano commençait à lui taquiner le râble à grande foulée, même si Promenade plane toujours nettement au-dessus de la mêlée. Pourtant, de l’auteur de l’admirable Your daddy’s car, on était en droit d’attendre une seconde salve plus consistante. On sait que l’Irlandais a longtemps séché sur sa nouvelle copie, menaçant même de tout arrêter, ou pire : de faire du rock. Le galop rythmique et les carillons qui ouvrent Casanova façon Neil était une fois dans l’Ouest infirment heureusement cette piste alarmiste. Something for the week end, country & western au pied tendre et à la mélodie épique, marche la tête haute sur les traces de pionniers fort recommandables : Scott Walker ou Lee Hazlewood, auxquels notre petite crevette rosâtre n’hésite visiblement plus à se mesurer. D’ailleurs, Hannon ne craint plus personne : ni Bacharach, auquel le tubesque Becoming more like Alfie est un tribute à lui tout seul, ni Kurt Weill Charge , ni la famille Gershwin au grand complet A Woman of the world. A ceux qui lui reprochaient jusqu’ici un certain laxisme quant aux finitions, il montre que le jus de crâne macéré depuis deux ans aura servi précisément à ça : parfaire encore un peu plus son don hypertrophié pour les arrangements de cordes, de pianos et de cuivres, fignoler les infimes détails, l’agencement panoramique des espaces. La différence essentielle entre cet album et le précédent étant que Neil Hannon ne semble plus dominé par sa propre ambition et ses excès de zèle, se laissant désormais simplement porter par l’impeccable force de ses chansons. Aussi peut-il offrir à son Frog princes l’apparat hollywoodien de La Mélodie du bonheur sans risquer le ridicule, ce qui n’est pas permis à tout le monde. La beauté spectaculaire de Songs of love qui rappelle quand même fortement le Golden brown des Stranglers et la sublime gravité de The Dogs & horses figurent parmi les sommets sismiques répertoriés sur l’album le plus dantesque de Divine Comedy. Et il nous manque à peu près vingt pages pour les détailler tous.
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