Les paroles s’envolent, les écrits restent. Lawrence nous avait affirmé bien fort qu’il sacrifiait son groupe ? en même temps que la décennie ? sur l’autel de l’insuccès, qu’il partait vivre à New York et qu’il reformerait un grand groupe sur un grand label. Il faut bien avouer qu’on y croyait qu’à moitié, quelle major […]
Les paroles s’envolent, les écrits restent. Lawrence nous avait affirmé bien fort qu’il sacrifiait son groupe ? en même temps que la décennie ? sur l’autel de l’insuccès, qu’il partait vivre à New York et qu’il reformerait un grand groupe sur un grand label. Il faut bien avouer qu’on y croyait qu’à moitié, quelle major aurait accepté de signer le pleurnichard surdoué de la scène anglaise ? Et puis nos réserves prenaient corps de jour en jour, surtout lorsqu’on a appris que Lawrence était revenu, bredouille, de New York après deux mois pour retrouver la grisaille londonienne. De son nouveau groupe, on ne connaît d’ailleurs toujours que le nom : Denim.
Et puis voilà que sort cette compilation de ses années Creation, comme Gold mine trash était celle de ses années Cherry Red. Rien d’extraordinaire en soi. Si ce n’est qu’il est marqué dessus en gros, en très gros même, et en vert sur fond rose, que Felt a fait dix album en dix ans. Soit une moitié de la proposition de Lawrence : Felt a fait dix albums en dix ans, il faut arrêter le groupe avec la décennie, c’est parfait .
Voici donc la compilation de la seconde moitié des années 80 : l’orgue geignard de Martin Duffy plutôt que la guitare larmoyante de Maurice Deebank, mais toujours les textes ? distrayants comme une blague de croque-mort ? de Lawrence, sa plume toujours coincée entre la frustration, le sentiment de culpabilité et l’inadaptation sociale. Si Bubblegum perfume laisse d’abord un drôle de parfum ? cafard automnal plutôt que pastel estival ?, c’est qu’on est littéralement saisi par l’unité de ce qui aurait pu être un album écrit sur plusieurs années. Les rares fois où l’espoir pointe son nez, il se fait immédiatement rabattre le caquet par la chanson suivante. On ne saura jamais si Lawrence connaît le sentiment de la joie de vivre, mais c’est en tout cas dans la désolation qu’il s’exprime, et avec quelle parfaite sensibilité grinçante. Bye bye, Lawrence de Felt, merci pour tes dix merveilleuses années de spleen ; on espère retrouver ta liquette de Denim très bientôt. Dans un registre plus gai ?
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