C’est, sur le papier, un scénario idéal pour une époque tarantinienne : des gueules inquiétantes de dandys amochés, des noms de fable rock’n’roll le chanteur s’appelle Max Décharné , des chansons écrites au cran d’arrêt (pointe fine), des titres aux saveurs fortes (Apportez-moi les restes d’Alfredo Garcia ou Enterre mon cœur sous le quai […]
C’est, sur le papier, un scénario idéal pour une époque tarantinienne : des gueules inquiétantes de dandys amochés, des noms de fable rock’n’roll le chanteur s’appelle Max Décharné , des chansons écrites au cran d’arrêt (pointe fine), des titres aux saveurs fortes (Apportez-moi les restes d’Alfredo Garcia ou Enterre mon cœur sous le quai n° 13), des pochettes où il n’est question que de filles faciles, de voitures rapides et de cartes à jouer, une ambiance moite et fortement sexuelle… Et pourtant, depuis fin 1994, les Flaming Stars restent, dans l’anonymat, les uniques ambassadeurs anglais d’un rock’n’roll déglingué mais à gueule d’ange pratiqué à New York et sans pincettes britanniques par les réjouissants Jonathan Fire Eater ou Jon Spencer. Ne pas s’arrêter au velours de milords dont les Flaming Stars s’habillent et vêtent leurs chansons : en vacances à Paris, ils préféreront toujours le pèlerinage Johnny Thunders au Gibus que la virée romantique sur la tombe d’Oscar Wilde. Car même si Morrissey fantasme sévère sur ces petites frappes de fête foraine sixties il avait déjà eu le même coup de foudre pour Gallon Drunk, précédent groupe du Décharné , pas question de voir en ce gang un orchestre de cabaret, poseur et inoffensif. Même élégants et régulièrement sophistiqués l’école Lee Hazlewood de la classe : bottines et col roulé , ne pas oublier que les Flaming Stars viennent des cavernes et que leur rock, grandi au garage, sentira toujours plus le cambouis que le Kouros. Avant d’inaugurer la statue de Nick Cave, il faudra donc absolument penser à visiter Kiss tomorrow goodbye ou le rockabilly gothique de Money to burn, hymnes déchirants pour crooners de poubelles, sur lesquels les Flaming Stars cherchent tranquillement des poux dans la gomina d’In the ghetto ou Always on my mind, les plus magnifiques canzonettes d’Elvis. C’est, on le sent, le but de cette compilation en forme de cours un rien énervé de rattrapage : rappeler à l’ingratitude des hommes qu’il existe un groupe du nom de Flaming Stars, capable de donner au Pulp de Freaks de sacrées leçons d’écriture naturaliste (Burnt out wreck of a man), d’égaler les Tindersticks dans le tragique pas du tout comique (A Hell of a woman), de prendre tous les jours Chrisou Isaak au combat de rue (Bury my heart at Pier 13). Alfredo Garcia a de la chance d’avoir trouvé de tels gardiens pour son mausolée.
Simon Triquet
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
{"type":"Banniere-Basse"}