Après avoir laissé leur trône vacant pendant douze ans, les rois de la pop anglaise retrouvent leur superbe. Critique.
Essayer de prévoir le prochain projet de Damon Albarn, c’est s’embarquer dans un jeu de piste aux indices contradictoires. D’après ce qu’il nous avait dévoilé en décembre dernier, on l’imaginait immergé dans une commande pour le National Theatre londonien et en pleine discussion sur Gorillaz avec Jamie Hewlett.
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L’annonce inouïe d’un nouvel album de Blur a donc été accueillie avec joie et stupéfaction, d’autant qu’il y a un an l’Anglais nous déclarait que le quatuor n’avait “plus le moindre projet de jouer ensemble sur scène ou de composer de nouveaux titres”. Sur ce tout dernier point, il n’avait pas tort puisqu’il s’agit du résultat des sessions de Hong Kong de 2013, récemment retravaillées par le fidèle Stephen Street et Graham Coxon.
Aux premières secondes de l’album, le premier depuis Think Tank en 2003, on entend une ambulance qui s’éloigne (plus besoin d’elle depuis leur réconciliation) et cette guitare prodigieuse qui leur avait sans doute autant manqué qu’à nous. Ludique et vibrante, Lonesome Street donne le ton de ce qui va suivre. Enregistré loin de tout repère occidental, dans le secret et donc sans pression, The Magic Whip (“le fouet magique”, en VF) ressemble à une longue récréation où le groupe prend un malin plaisir à bidouiller ce qu’il a sous la main, sans arrondir les angles, sans se refuser l’euphorie d’un refrain en “oh-oh-oh” sur le sautillant Go out.
Le songwriting mutant de Damon Albarn revisite son passé : la ballade New World Towers fait écho à son album solo, Ghost Ship aux basses dub de Gorillaz. Mais ce huitième album est aussi celui qui marque le retour tant attendu de Graham Coxon et de ses riffs déglingués, omniprésents dans les mélodies bouillonnantes comme dans les temps calmes (les fabuleux Pyongyang et My Terracotta Heart).
Contrairement aux groupes qui ne sortent de leur retraite que pour des tournées best of, Blur prouve avec panache que ses talents créatifs et ses prises de risque imprévisibles n’ont pas fini de frapper – d’un coup de fouet magique.
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