Belle réédition d’un chef d’œuvre scintillant d’Isaac Hayes : Moïse, avant la mouise.
En 1970, Isaac Hayes n’est pas le Moïse noir annoncé. Par contre, il est déjà le Cecil B. De Mille de la soul. Avec Hot Buttered Soul, il vient de changer les normes du genre, a fait passer la production au super et mis du dolby dans le sound. Depuis, il accumule miracles et disques d’or. La B.O. de Shaft en a fait un homme riche, puissant, paré de chaînes en or, couvert de fourrures et de femmes. A ce stade de son règne, Stax, son label, n’est plus en mesure de refuser ses caprices. Pas même un projet pharaonique tel que Black Moses, double album imposant par les moyens techniques (six ingénieurs du son !) et le caractère épique de son contenu, la plupart des morceaux, véritables rhapsodies soul orchestrale, oscillant entre sept et dix minutes. Jusqu’à l’emballage cruciforme, scrupuleusement reproduit pour cette réédition, qui explose conventions et budgets. L’esprit général apparaît pourtant décalé par rapport à cette mise en scène. Loin d’être un album prophétique, au sens où Bob Marley l’entendait, Black Moses est la luxueuse confession d’un homme, profondément ébranlé par un divorce, en quête de rédemption affective. Hormis deux compositions originales, les chansons sont des adaptations de standards, souvent des ballades comme Close To You des Carpenters, Never Fall In Love Again de Dionne Warwick, où Hayes ouvre les grandes eaux de l’hyper sentimentalité. Vocalement, il n’ira jamais plus loin dans le registre sensualité virile. Bande-son idéale pour rallye sexuel, l’album a aussi, par sa démesure, un arrière-goût de film catastrophe. D’ailleurs Hayes sera ruiné, et Stax déposera le bilan cinq ans plus tard.
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