L’artiste questionne sans détours le racisme américain, du haut de ses 27 ans.
Débarqué sans prévenir en 2014, il avait scotché une salle entière lors du festival des Inrocks. Sautant dans tous les sens, il refusait de canaliser sa fougue encore juvénile. Trois ans plus tard, Benjamin Booker s’est (un peu) calmé.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Côté inspiration, il a délaissé Jack White au profit de l’écrivain James Baldwin, à qui Raoul Peck a récemment consacré un documentaire, I Am Not Your Negro. “C’est une figure tutélaire de mon existence. Quand je l’ai découvert il y a quelques années, ça a été la révélation : quelqu’un avait couché sur papier mes peurs et mes angoisses d’homme noir américain. Witness parle du fait qu’elles n’ont quasi pas changé depuis les années 1960, malgré la fin de la ségrégation.” Peut-on se contenter de regarder sans rien dire, s’interroge-t-il dans le morceau-titre, superbe démonstration rock’n’roll et gospel partagée avec la divine Mavis Staples ?
Fervent supporter du mouvement Black Lives Matter, Booker esquive néanmoins le format protest song. L’engagement, il le vit depuis longtemps, depuis qu’il a décidé de quitter la Floride pour La Nouvelle-Orléans afin d’aider à la reconstruction post-Katrina.
Aujourd’hui, il s’est installé à Los Angeles, pour se “sentir davantage investi dans l’industrie de la musique”. Entre-temps, un séjour mouvementé au Mexique l’a aidé à écrire ces dix pistes brèves et intenses. Enregistré entre Woodstock et Brooklyn, produit par Samuel Cohen (Norah Jones), Witness laisse entendre une guitare électrique toujours aussi rugueuse, et la production ne s’éloigne pas des premières amours punk lo-fi (Right on You, All Was Well). Mais, ouvrant la porte à une soul ultramélodique (Believe) ou un folk-rock sans fioritures (Off the Ground), Booker façonne son propre langage de jeune bluesman – qui s’ignore mais auquel on croit tous dur comme fer.
{"type":"Banniere-Basse"}