Rencontre sur le tournage, au milieu des gratte-ciels.
Joakim boit du café dans le salon du Paul O Colliton, un studio perché au 20e et dernier étage d’une tour de la 7e Avenue. Il est 8h du matin et New York, à travers les vitres, a encore ce petit voile brumeux dont aura vite raison le soleil de février. Joakim boit du café et checke les derniers détails du tournage qui approche. Le danseur Daniel Baker répète et peaufine son maquillage. Il s’échauffe devant le miroir pour affronter le froid extérieur – un peu moins de 0°C et un petit vent pas cool – et assurer les pas de danse parfois dénudés de la chorégraphe Blanca Li, également réalisatrice du nouveau clip de Joakim, pour le morceau Samurai.
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Une fois sorti du Paul O Colliton Studio par un petit couloir puis une petite échelle, New York s’étend de façon frontale.« Il y a une vraie culture du toit à New York, dit Joakim. Mais celui-ci est particulier parce que c’est un toit sur deux niveaux. A l’image, c’est comme s’il n’y avait pas de bordures. On a l’impression de flotter. » La vue se balade de l’énorme chantier de Penn Station à l’amas de verre et d’acier de Lower Manhattan, d’où s’élève, comme un mirage, le One World Trade Center. Entre les deux, il y a donc la 7e Avenue, et puis les buildings plus modestes de Hoboken, de l’autre côté de l’Hudson.
« Interpréter des idées »
La raison d’être du clip est « d’incarner l’idée de se séparer de sa peau à travers le rêve et l’abandon », estime Daniel Baker, dont les mouvements mettent en forme cette recherche de transe et de sortie de soi. Une idée inspirée, raconte Joakim, par la scène finale du film Beau Travail de Claire Denis, dans laquelle Denis Lavant se met à danser de façon désordonnée dans un club de Djibouti, une clope à la main et l’esprit ailleurs.
Le reste est le travail de Blanca Li, qui a composé autour de cette vision de lâcher prise.
« La rencontre a été belle et marquante pour moi de par la confiance que Joakim a accordé à ma manière d’interpréter des idées qui étaient déjà claires dans son esprit, raconte-t-elle dans sa note d’intention. J’aime son universalité, son amour du beau, son sens esthétique et artistique qui se ressent si bien dans sa musique. (…) J’adore le fait qu’il puisse y avoir plusieurs lectures de cette vidéo et qu’elle soit porteuse de tant d’émotions. »
La réalisatrice et chorégraphe Blanca Li sur le tournage du clip de « Samurai » (photo Dutty Vanier)
Un samurai à New York
Le morceau Samurai est extrait du sixième album de Joakim, également titré Samurai et disponible depuis le 17 mars via Tigersushi, le label que Joakim a monté il y a quelques années à Paris. A l’époque, le garçon n’habitait pas encore New York. Ça fait cinq ans qu’il vit ici et c’est ici aussi, dans son nouveau studio, qu’il a confectionné ce nouvel album. Dedans, Joakim raconte des histoires d’« exil » et de « sentiment d’étrangeté » sur fond d’esthétisation japonisante. Joakim s’est d’ailleurs plongé dans l’histoire folle et trouble de l’écrivain Yukio Mishima, qui, après avoir bâti une oeuvre devenue culte, a mis en scène sa mort lors d’une tentative ubuesque de coup d’Etat en novembre 1970.
Joakim sur le tournage du clip de « Samurai » (photo Dutty Vanier)
Joakim évoque également « mille autres influences » ayant nourri l’écriture et l’enregistrement de Samurai, mais ça ferait beaucoup à énumérer. Sur le tournage du clip, un petit appareil photo a remplacé le coffee cup entre ses mains. Joakim documente la mise en réel de ses visions. Les moments de flottement alternent avec ceux de gros rush, comme souvent sur un tournage. Le soleil est désormais haut dans le ciel. Le voile recouvrant la ville s’est dissipé mais le vent, lui, s’est levé. Du coup, la machine à fumée du tournage fait n’importe quoi, et la vue sur la ville se brouille. New York aussi se met à danser.
> clip Samurai (Paradoxal/Tigersushi)
> album Samurai (Tigersushi/Because)
> concert du 30 mars au 1er avril à Paris (Salò)
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