Avec son premier album, Oboy montre au reste du rap français que la prise de risque artistique combinée à des valeurs sonores solidement ancrées est gage de réussite.
Oboy parle peu. Il ne s’épanche pas en dissertation sur ses méthodes de travail, sur son inspiration ni sur son parcours. Résultat, comme à chaque fois qu’un artiste reste aussi évasif, on écrit que sa musique parle pour lui. Avec la sortie de son premier véritable album, Omega, le rappeur de Villeneuve-Saint-Georges fait surtout parler la poudre. L’an dernier, les huit morceaux de Southside avaient confirmé plusieurs choses.
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Tout d’abord, Oboy se pose comme le plus digne représentant du mumble rap (pourtant en perte de vitesse) en France, identifié par une noirceur et une nonchalance exacerbées devenues marque de fabrique. Ensuite, sa capacité à alterner morceaux mélancoliques et titres angoissants doivent lui valoir la jalousie de plus d’un. Encore faut-il pouvoir tenir cela sur la longueur, d’où l’impatience que suscite la sortie d’Omega.
Aya Nakamura brille en feat.
En plus d’être un taiseux, Oboy ne s’acoquine que très peu avec ses confrères rappeurs. Les featurings sont très rares, et cet album n’en est qu’une preuve supplémentaire. Seul le single Je m’en tape, paru en amont, convoque d’autres noms que le sien, et pas n’importe lesquels : Dopebwoy, star du rap néerlandais, et surtout Aya Nakamura. Un gros coup, mais surtout une démarche inhabituelle pour le bonhomme qui traduit une envie d’aller plus haut avec ce projet.
Pour Oboy, travailler avec Aya semble naturel. Son équipe de beatmakers attitrée, Le Side, a composé une grande partie des titres de l’album Nakamura. D’ailleurs, cette patte musicale se retrouve souvent sur Omega (Rien à fêter, R10…), comme si les évolutions récentes de ses compositeurs déteignaient sur sa propre musique.
Mais la marque de fabrique du rappeur, c’est le “son bre-som”, les basses gongs, ces instrumentaux construits autour de notes graves de piano (Wu-Tang, Ma$$a…). Son titre Cobra était déjà dans cette veine l’an dernier, confirmant l’idée que Humble de Kendrick Lamar a fait bien des petits.
Mais quel intérêt si l’album ne contenait que cela ? Si Omega parvient à être si fou, si bon, c’est qu’Oboy s’ouvre des portes qu’il s’était retenu de pousser auparavant. Il y a ce titre fantastique, Avec tøi, qui sent le Kavinsky à plein nez, une échappée sonore qui donne envie de prendre sa caisse et de rouler à l’aveugle, sans checker les panneaux de direction.
Sans oublier Ølympe, morceau hyper-produit qui tranche avec l’apparent minimalisme du rappeur, arpèges de piano et structure linéaire dehors. Avec Omega, Oboy réussit là où bien des homologues échouent : évoluer sans trahir son identité musicale, proposer, essayer, tout en restant fidèle à ses principes.
Omega (6 & 7/Believe)
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