Sur “KICK ii”, la productrice continue à faire serpenter sa musique entre fantômes du passé et horizons nouveaux.
On se surprendrait presque à vouloir ressasser le parcours d’Arca, la présenter en listant ses collaborations décisives des années 2010 : le pari FKA twigs avec EP2 et l’audace Kanye West sur Yeezus en 2013, puis la confirmation avec Björk le temps des complémentaires Vulnicura (2015) et Utopia (2017)… Comme si Alejandra Ghersi n’avait pas déjà prouvé sa valeur en solo, ayant su jongler sur ses quatre premiers albums solo avec son identité de productrice et son statut d’artiste indépendante.
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Sur les protéiformes Xen (2014) et Mutant (2015), successeurs de mixtapes et de maxis liminaires qui lui avaient déjà valu de se faire remarquer, elle se montrait technicienne, peaufinant par des pistes abstraites et déformées les textures organiques qui caractérisent sa griffe. Puis, en 2017, le sacre d’Arca la voyait se rêver chanteuse, prêtresse d’une pop tumultueuse et grandiose.
La musicienne continue de faire infuser dans ses rythmiques son héritage sud-américain
Résultat de cette trajectoire : en 2020, Arca présentait KiCk i, disque initiateur d’une anthologie où la musicienne se cherchait en réinventions, et où les expérimentations pop qui la voyaient s’essayer encore timidement à la musique latine (KLK ; Mequetrefe) côtoyaient les hits réchauffés avec suffisamment de savoir-faire pour convaincre (Calor, No Queda Nada). Une expérience qu’Alejandra prolonge donc avec KICK ii, suite évolutive de sa démarche où la musicienne continue de faire infuser dans ses rythmiques son héritage sud-américain, embrassant cette fois avec véhémence la démarche d’une réinvention passant par le retour aux sources.
Ce n’est pourtant pas ce que laissait entrevoir Born Yesterday, single d’annonce du projet, collaboration inattendue avec Sia et hit radio-friendly qu’on jurerait écrit pour Rihanna. Pourtant, à l’écoute, KICK ii ne déguise jamais ses intentions et s’ouvre même, après une introduction qui justifie le titre de “diva expérimentale” que la musicienne s’octroie, sur quatre morceaux reggaeton instantanément essentiels, qui donneraient presque à voir le projet comme un mix.
Renouant spasmodiquement avec les essais aqueux de Xen (Andro, titanesque conclusion qui légitime à elle seule l’écoute de KICK ii), Arca parvient à apporter à sa démarche de gestation identitaire les doses d’audace et de mesure qui faisaient défaut à son précédent LP. Si l’accouchement a commencé dans une relative douleur, la (re)naissance d’Arca promet de défier les espérances.
KICK ii (XL Recordings/Wagram). Sortie le 3 décembre.
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