Aux prémices de son projet solo, Manon Pédrono dévoile “Zuunz”, single annonçant la sortie de son premier EP. Pythie punk des plus subversives, elle s’apprête à investir la scène des Inrocks Super Club ce 18 octobre.
Dans son jardin intérieur, il y a des mecs canons en slip. Voilà ce que chante BLANK\\, d’une voix faussement ingénue, auprès de l’autoproclamé “fantôme carnavalesque” qu’est le groupe Marcel. Ensemble, ils ont fait naître en 2022 Intimité, titre tout en facéties qui vous ballotte sans vergogne, dans un post-punk galvanisant… et qui a eu le mérite de catalyser mille questions à propos de cette artiste aux prémices de tout, et dont on ne savait pas encore grand-chose.
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Puisse tout le monde s’accrocher fermement à son siège, car Manon Pédrono de son vrai nom est de celles dont le verbe est haut, les rangeos bien ancrées au sol et le regard vous poussant vers des abysses nébuleux. Prête à en découdre, elle dévoile Zuunz, premier single issu de son EP Inconsistent People, à paraître le 10 novembre. Le clip qui l’accompagne, sorte de plongée hallucinatoire teintée de rouge, est une réalisation de Rainbow Rushes.
De Brighton à Caen
Par instinct artistique ou envie de subversion, elle quitte sa Normandie natale pour Brighton où elle butine de groupe en groupe : Brain Queen, Deaf Surf… Tous punk, s’il fallait encore préciser. Elle y affûte ses armes, squatte les clubs underground de la ville et pioche dans les inspirations musicales de ses compagnons de route, au gré des “teufs” d’après-concerts, toujours bien arrosées. Des fragments de sons amassés dans sa besace, elle tire son premier projet solo “post-punk-trip-hop-noise-rock” selon ses dires, qui s’accompagne d’un retour à Caen après dix ans passés outre-Manche.
Inconsistent People n’était ni prévu, ni pensé : il a jailli par la force des choses. Une sorte de “patchwork”, dit-elle, fruit de démos enregistrées à la volée dans sa chambre ou à la salle de musiques actuelles d’Évreux. Sortir un EP, cela lui était bien égal. “Ça ne m’intéresse pas, je n’aime pas être en studio, je n’aime pas tout ce qu’il y a autour, le fait de ‘défendre’ une sortie.” “Dit-elle en faisant une interview !”, renchérit l’artiste d’un ton rieur. Intellectualiser sa musique, voilà qui a donc le don de l’ennuyer : BLANK\\ embrasse les milieux DIY depuis une quinzaine d’années et n’a que faire des discours. Elle tâtonne, écrit, essaie. Envoie tout valser quand elle n’y trouve plus son compte. De ces pérégrinations artistiques ressortent cinq titres ô combien caustiques. Le son crache, vous éclabousse les joues, pris en étau entre l’urgence de l’instrument et la langueur de sa voix.
La scène ou rien
Fini les gigs en groupe, c’est maintenant seule que BLANK\\ investit les scènes, espaces à la liberté infinie où elle se fait le relais de ses textes, tantôt résignés, tantôt revanchards. Car sa musique est à la fois ténébreuse, piquante et intime, “tendue mais qui n’explose jamais”. Son autrice y introduit ses désillusions comme ses errements. Avec, parfois, une touche d’humour, elle qui parle de son œuvre comme du “post-punk de salle des fêtes”.
À la résignation, BLANK\\ dit préférer la nonchalance. Et pour cause : lors de ses concerts, elle se réapproprie tout, de sa singularité à son estime d’elle-même. C’est ainsi qu’elle est parvenue à s’affranchir de la gêne dont elle était assaillie à ses débuts, plongeant son regard vers ses pieds comme subterfuge. Aujourd’hui, la musicienne ne s’excuse plus d’être sur le devant de la scène. Elle y lâche même quelques doigts d’honneur quand vient le moment de jouer Clean – titre où elle dénonce les violences sexuelles –, faisant fi de publics parfois peu réceptifs à son féminisme sans concession.
Quand Manon Pédrono performe, c’est un sombre passé qu’elle piétine – à commencer par une enfance régie par la loi des cool kids qui la harcelaient. Et par la sueur du live, un personnage salvateur prend vie : “C’est du théâtre, mais comme tout : tout est performance, performatif”, assure-t-elle. Pour autant, elle dit peiner à mettre des mots sur ce qu’elle propose artistiquement, alors même qu’elle répond à cette interview “de bonne humeur au soleil en train de rouler [sa] clope”. Car voilà, sa musique explore davantage l’amertume et les déceptions glanées par l’expérience des relations humaines. Sa présence scénique, elle, tient plus de la “confrontation”. On l’a dit : BLANK\\ est prête à en découdre.
Le téléphone à peine raccroché, elle partait aussitôt en vadrouille avec le Biche Club, “collectif de meufs et minorités de genres, musicien·nes” pour trois jours de résidence en Normandie. Avec une poignée d’objectifs bien définis : “Passer du temps ensemble, faire de la musique, des formations… et défoncer le patriarcat.” Prochaine escale de sa sulfureuse et grisante traversée : la scène des Inrocks Super Club à la Boule Noire, le 18 octobre. On y sera.
BLANK\\ en concert le 18 octobre aux Inrocks Super Club à La Boule Noire, avec Special Friend et Moreish Idols. Vous pouvez déjà réserver vos billets à cette adresse.
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