De grossiers faussaires pillent les seventies pour inventer le rock régressif : nostalgie, que de crimes commis en ton nom. A quelques mois des élections législatives anglaises dont le seul thème semble être la souveraineté britannique, et par conséquent l’appartenance ou non à l’Europe monétaire , pas étonnant que le rock anglais joue la […]
De grossiers faussaires pillent les seventies pour inventer le rock régressif : nostalgie, que de crimes commis en ton nom.
A quelques mois des élections législatives anglaises dont le seul thème semble être la souveraineté britannique, et par conséquent l’appartenance ou non à l’Europe monétaire , pas étonnant que le rock anglais joue la même carte, démago et écoeurante, de l’anglocentrisme et de la nostalgie. La nostalgie, pour une nation, c’est surtout le décompte des colonies perdues, des empires effrités. Pour comprendre l’attachement des Anglais à Paul Weller et sa cour de fins de race Ocean Colour Scene, Kula Shaker, Oasis, Dodgy, Mansun , il faut entendre les ahurissants cours d’histoire distillés encore ici à la jeunesse : il y est toujours question d’Empire, de premier rang mondial, de maîtrise des océans, de ces antiquités vermoulues. Pas étonnant, donc, que l’Angleterre s’attache avec une telle virulence à sa pop-music, sa dernière colonie à l’étranger. Une Angleterre tellement nostalgique de ses antiques faits d’armes qu’il existe désormais un magazine entièrement consacré aux épopées anciennes des clubs anglais de football, que des cafés se sont spécialisés, trente ans après, dans la diffusion sur écran géant des matchs victorieux de l’équipe nationale lors de la Coupe du monde de 1966. Et Mansun, c’est exactement ça : un vieux match de foot joué sur une technologie moderne, dont on connaît à l’avance les percées et les buts, uniquement destiné à alimenter le vague à l’âme, la larme à l’oeil. Il n’y a pas si longtemps, pourtant, les Britanniques faisaient de solides guerroyeurs, capables de tenir un siège contre le temps et l’ingratitude : Ray Davies, Jarvis Cocker, Costello ou Bowie se battront ainsi jusqu’à la mort de bêtise, pour Elvis. Aujourd’hui, il ne reste presque plus que des kamikazes, envoyés pour brûler au sommet des charts sans espoir de retour. C’est au moins ça qui rassure : l’année prochaine se passera, c’est déjà certain, de Mansun. Si on peut sourire quand Suede ressort le glam-rock en l’état, on arrête immédiatement de rire quand Mansun convoque les pires effets spéciaux du rock progressif pour rendre encore plus indigeste son nauséeux lyrisme, sa musique régressive (le début de l’album veut absolument marier Bowie/Eno à ELO, une idée cauchemardesque), ses étirements risibles, ses vols à la tire (Taxloss chez les Beatles, You, who do you hate chez Queen, Disgusting chez Whitesnake, Egg shaped Fred chez Martin Circus, Wide open space chez Jaïro). Car si Attack of the grey lantern est bel et bien un de ces calvaires de concept-albums, son concept en est simple : un Que sais-je des seventies anglaises, réactionnaire et fastidieux, tellement menteur qu’on le jurerait écrit par un de ces méchants députés conservateurs qui convoquent l’esprit de Churchill dès que l’Angleterre fait mine d’avancer. On a tout à fait le droit de prendre Attack of the grey lantern pour une vessie. Bâillonnée et diabétique.
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