Sur scène, les cinq Montréalais d’Atsuko Chiba manient les sens : le groupe combine des sonorités post-rock planantes avec des effets de lumières psychédéliques, réalisés par leurs soins et projetés sur les murs. Pour les Inrocks Super Club de ce 29 mai, le groupe invitera dans ses rêveries l’auditoire de la Boule Noire.
“Il y a comme une unité familiale autour d’Atsuko Chiba et Mothland, et ça représente bien ce qu’est notre groupe : on est aussi une famille, des amis. Même en dehors du groupe, on mange ensemble, on part en vacances ensemble…” Le 29 mai prochain, aux Inrocks Super Club, il va décidément y avoir comme un esprit de famille à la Boule Noire, puisque sur scène, on verra défiler Hot Garbage et Atsuko Chiba, deux des groupes du label montréalais Mothland, aux côtés d’Arthur Fu Bandini.
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“On les a rencontrés plusieurs fois. Juliana, la bassiste de Hot Garbage, bookait nos shows parfois quand on allait aux États-Unis, ou à Toronto. Donc j’ai hâte, parce que ça sera la première fois qu’on joue ensemble, ça va être comme une petite fête”, ajoute le guitariste et chanteur Karim Lakhdar, que nous avons rencontré.
Le collectif avant tout
Cette communion dont il nous parle, c’est un peu l’essence même du groupe : une bande de potes qui, de fil en aiguille, ont partagé le même pâté de maison, les mêmes bancs d’école, pour se retrouver sur une même scène. “On était dans le programme spécialisé musique. L’hiver, il y a toujours une fête de fin de semestre avec des concerts et des spectacles. On a demandé à jouer, mais il nous manquait un nom. Kevin avait vu Paprika, de Satoshi Kon, il a proposé que l’on s’appelle Atsuko Chiba, et c’était parti.” Ce nom est celui de la protagoniste de ce film d’animation, une psychothérapeute qui s’immisce dans les rêves des autres pour les guérir…
Depuis les premières notes échangées au studio aménagé de l’université Concordia à Montréal, le groupe formé par Anthony Piazza (batterie), David Palumbo (basse, voix), Eric Schafhauser (guitare, synthés), Karim Lakhdar (guitare, voix, synthés) et Kevin McDonald (guitare, synthés) se construit en osmose : la volonté du collectif prime sur l’intérêt personnel.
“C’est vraiment un processus homogène, on travaille tous ensemble”
Karim Lakhdar
“On est un groupe où tout le monde écrit sa propre partie, et tout le monde est intégré au processus d’écriture et de création. Donc on n’est pas dans un concept où il y a une personne qui s’occupe de tout, et puis le reste suit. C’est vraiment un processus homogène, on travaille tous ensemble. Ce n’est pas toujours la chose la plus facile au monde quand tu as cinq personnes en train d’écrire une chanson ou un album. […] Il y a beaucoup de réflexions sur soi dans ces cas-là, beaucoup de conversations. Il nous arrive de parler plus qu’on ne joue, parce que parfois le concept est la chose la plus importante à établir en premier, avant de commencer à écrire quelque chose”, nous explique Karim.
S’ils sont accompagnés par Mothland depuis peu, les cinq d’Atsuko Chiba cultivent le besoin de tout faire par eux-mêmes. Et leur album Water, It Feels Like It’s Growing n’y déroge pas : composition, production, enregistrement, mixage, rien ne leur a échappé. Depuis 2015, le groupe a même construit son propre studio, dans un hangar industriel désaffecté : “On a créé deux chambres, avec une salle pour faire le mixage et une autre pour enregistrer. Et au fur et à mesure des années, on a ajouté des petites pièces d’enregistrement, comme des preamps, des microphones, plusieurs types de batterie, des amplificateurs, des synthétiseurs, et tout ça. Donc ça nous a pris presque huit ans pour en arriver là.”
“Tout est vivant”
Un dispositif maison donc, qui leur a permis de donner à leur dernier disque une forme brute, enregistré sur l’instant, et “de ne pas prendre trop de temps à changer les choses s’il y avait des petites erreurs” : “On s’est juste dit que si le feeling était bon, on gardait tout tel quel. Ça ne doit pas toujours être parfait. Parfois, en voulant trop rentrer dans les détails de correction, tu perds un peu l’essence de ce que tu fais.”
Pour Water, It Feels Like It’s Growing, le groupe canadien a choisi, en guise de concept, de capturer le plus d’éléments en direct, “comme la basse ou la batterie, les guitares et les voix”. Avec l’envie d’être organique et connecté avec le moment : “Ce sont des aspects hyper importants pour nous, pour le dernier album. […] Tout est vivant.” Le dernier morceau, qui donne son nom au disque, a été presque entièrement enregistré en live. Dans la continuité de cette approche de la musique, le thème de l’eau est récurrent : “L’eau qui donne la vie, et l’eau qui pourrait aussi submerger. Donc il y a cette dualité là qui est intéressante dans l’album.”
Projections et effets visuels
Dans cette quête sensorielle, Atsuko Chiba accorde autant de temps à ses sessions d’enregistrement qu’à la préparation de ses concerts. Depuis huit ans, le groupe pimpe ses performances live avec des projections et des effets visuels lumineux : “On voulait cet aspect sensoriel supplémentaire. […] Avoir ses propres lumières et des visuels derrière soi, ça peut complètement changer l’atmosphère d’une chanson. Quand tu joues avec des lumières ouvertes comme ça, ça donne un sens, une expérience, une émotion, et en changeant ça chanson par chanson et section par section, ça amène l’auditoire dans une autre expérience, dans un autre monde. C’est ça qu’on essaie de créer quand on joue en live.”
Alors qu’Anthony, le batteur, se charge de l’aspect visuel des concerts (création des scènes, des images projetées sur les murs), c’est le groupe lui-même qui rend cela possible sur scène : “Anthony, Eric et Dave, en temps réel, font les changements de lumière en fonction du rythme.” L’équipe amène ses propres projecteurs, ses images, et la musique prend vie, les lumières évoluent au rythme des effets de guitare ou des notes de grosse caisse.
Pour sa deuxième date parisienne (et française) – la première ayant eu lieu à la Mécanique ondulatoire, en 2017 –, Atsuko Chiba compte illuminer les murs de la Boule Noire et emporter son auditoire dans son univers, où les couleurs et les élans post-rock psyché ne font qu’un.
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