Chaque jeudi, “Les Inrocks” vous proposent de découvrir un groupe ou un artiste que vous ne connaissez pas (encore). Cette semaine, on vous entraîne dans l’univers onirique du rappeur franco-camerounais Mikano, qui partage son troisième EP “Melting Balloons” et dévoile la première partie du clip “When It Rains Glitter”.
« Summer Walker… elle est vraiment trop forte ! » Des enceintes fixées au plafond s’extirpe Girls Need Love, l’un des titres phares de la chanteuse Summer Walker, que Mikano écoute attentivement en remuant la tête. Malgré une enfance passée entre le Cameroun, dont ses deux parents sont originaires, et Abu Dhabi, où son père ingénieur s’est un temps installé, le Parisien de naissance s’est principalement nourri de la scène hip-hop américaine. « Snoop Dogg est l’un des premiers artistes qui m’a marqué : mon père m’avait acheté l’album The Last Meal quand j’avais 5 ans, ça m’a tout de suite parlé », se souvient-il. « Mais celui qui m’a donné envie d’écrire, clairement, c’est Lil Wayne. »
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Plongé dans ses souvenirs, Mikano nous parle également de l’importance de Kanye West et Kid Kudi, deux artistes qui, affirme-t-il, « t’emmènent toujours hyper loin de la Terre », ainsi que The Weeknd et Frank Ocean, Blood Orange et Alabama Shake. Alors forcément, lorsqu’il décide de donner vie à ses premiers textes à l’âge de 13 ans, le Français opte sans trop se poser de question pour la langue de Shakespeare.
« Au vu de mes références, principalement anglo-saxonnes, je me sentais plus légitime d’écrire en anglais, confesse-t-il. D’autant que j’ai eu une belle-mère américaine pendant sept ans, j’étais donc bilingue quand j’ai commencé à écrire. » C’est lors de vacances estivales au Cameroun que, encouragé par les retours enthousiastes de ses cousins, Mikano façonne son premier morceau. « C’était un son assez… bizarre », avoue-t-il dans un rire. « Mais c’était le début de quelque chose. »
Un univers clair-obscur
Grâce au soutien infaillible de son meilleur ami, qui lui loue ses premières sessions en studio en banlieue parisienne, le rappeur en devenir passe rapidement derrière le micro et partage ses premiers singles sur SoundCloud. Mais c’est la rencontre avec le producteur Sutus, quelque temps plus tard, qui le fait passer à la vitesse supérieure. « C’était la première fois que je rencontrais quelqu’un dans le même exact délire que moi, relate-t-il. Il est rapidement devenu mon binôme, tu sais, celui avec qui tu n’as même pas besoin de parler pour le comprendre. »
Ensemble, les deux garçons s’exercent, encore et encore, et de ces expérimentations naît en 2017 No Devices Found, le premier EP de Mikano. Composé de six pistes, ce projet posait les bases de son ADN musical : un rap grave et percutant, inscrit au cœur d’une atmosphère planante, dans laquelle il extériorise ses émotions enfouies.
Son second EP Blind Man Dreams, paru un an plus tard, précise les contours de sa musique. « C’est vraiment le projet où je me suis dit que je commençais à avoir ma couleur », commente le jeune homme de 25 ans. C’est aussi celui avec lequel il impose son univers visuel, coincé quelque part entre ombre et lumière, puissance et légèreté. Réalisé par Antonin Wolvs, le clip de « Plastic » souligne l’ambition esthétique de Mikano, pour qui l’image est primordiale, permettant de nous immerger toujours plus loin dans son monde intérieur. « Je suis très impliqué dans la direction artistique de mon projet, que j’ai envie de pousser toujours plus loin », explique-t-il.
https://www.youtube.com/watch?v=PQaGCtFzR9U
Un troisième EP fait à l’instinct
La preuve avec Silhouette, le premier extrait de son troisième EP Melting Balloons, disponible ce vendredi 6 mars. Inspirée par Black Swan, cette vidéo signée Juliette Labrousse met en lumière la puissance et la grâce d’une danseuse de classique métisse, bousculant ainsi les règles de cet art où les danseuses sont majoritairement blanches. « L’idée de cette vidéo, c’était de poser cette question : « Et pourquoi pas ? Pourquoi pas une métisse qui fait de la danse classique ? », décrypte-t-il. J’ai adoré Black Swan, mais je me suis toujours dit que ça aurait été encore plus fort si l’actrice avait été noire, métisse ou asiatique. »
Cette envie, celle de briser les codes, de proposer une autre voie, est au cœur de Melting Ballons. Les neuf titres qui le bâtissent sont une invitation à imaginer, à rêver, à laisser libre cours à son interprétation. Entre rap, R & B, trap et parfois même afrobeat et two step UK, ils forment une collection éclectique d’émotions brutes que notre artiste a créé en laissant parler son instinct. « Jusque-là, j’écrivais principalement mes textes à partir de mes émotions, de façon très introspective, et ensuite je les posais sur une prod' », décrit-il, avant de poursuivre :
« Pour Melting Balloons, le processus a été radicalement différent : je n’ai rien écrit en amont. J’arrivais, j’écoutais l’instru, je plaçais un mot, une phrase… et j’avançais comme ça, phrase par phrase, en peaufinant le tout à la fin. C’est ce que font les rappeurs de la scène trap d’Atlanta, sur lesquels je me suis pas mal documenté. Résultat : les morceaux de Melting Balloons n’ont pas nécessairement de liens entre eux, mais ils donnent vie à une suite d’images, de belles images que j’ai choisies et qui représentent une émotion ou un mood en particulier. C’est un processus beaucoup plus instinctif, qui je trouve, permet de faire davantage vivre le morceau, notamment en live. »
https://www.youtube.com/watch?v=FAdtqwsNZOk
Le live, Mikano dit d’ailleurs en avoir hâte. Après avoir assuré les premières parties de la chanteuse Calypso Rose, il sera en concert le 27 mars prochain à La Seine Musicale de Boulogne-Billancourt. « Je prépare également un nouveau projet, pour lequel j’ai déjà une trentaine de sons… », prévient-il. Vivement.
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