Son retour confirme qu’il est distingué, mais pas que : c’est ce qui le distingue.
Naturellement, l’hypothèse d’un french pop master de l’ombre, claviériste du premier album de Marquis De Sade, concepteur du son de Daho dès Le Grand Sommeil, praticien du grand écart grâce à des collaborations autant avec Sylvie Vartan que Brigitte Fontaine, et fanal de l’été 1986 (l’acide et entêtante Adélaïde, en duo avec Zabou), s’avère réducteur. Certes,
la voix racée, son air de ne pas y chanter, et les harmonies distinguées autorisent la référence immédiate à l’ami Etienne.
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Mais l’art de Turboust, raffiné et d’une folle élégance, dépasse amplement le statut de la pose rance ou, pis, celui du clone frelaté.Interrompant cinq années de silence discographique, ce cinquième album (coproduit par Richard Conning de The Lines) démontre surtout, en douze chansons, une reprise (Le Soleil et la Lune de Trenet fait tournebouler planètes et cœurs) et un instrumental, la capacité du discret à usiner une chanson populaire stratifiée : des mélodies immédiates, c’est le moins, et, d’un vibraphone liquide en ouverture jusqu’aux cascades de claviers conclusives, toutes ces attentions sonores qui trahissent un goût pour la polychromie. A ce titre, le charme fragile de Ma danseuse, l’ironie de Bubble gum ou l’aéroporté En king size atteignent immanquablement la cible du tube parfait.
Mais le Normand n’en reste pas là, s’autorisant une écriture au rasoir (Le Prix de mon silence) et quelques autoportraits sans concessions. Dans une atmosphère de jazz after hours, Efféminé conte acruellement les années de renommée et ceinture dorée, et la vacuité qui va avec. Et les silences entre les notes, l’onirisme et les contours incertains peuvent alors déployer leurs fastes.On l’étiquette dandy ou aristocrate du refrain. Plus simplement, cet homme est flou, complètement flou, et n’en est que plus cher à nos petits matins.
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