Saisi à Manchester, un live nerveux d’ARCTIC MONKEYS brillamment et sobrement filmé.
(Warp Films/Domino/Pias)
Imaginez la blague : Miossec, par exemple, réussissant à obtenir une subvention de la mairie de Brest pour financer un DVD live enregistré à Rennes, avec des chansons racontant le quotidien désœuvré et glauque de Recouvrance, et sensées faire la promotion de la ville. Un tour de force (farce) réussi par les Arctic Monkeys, qui ont réussi à se faire payer par la municipalité de Sheffield ce DVD enregistré dans la voisine honni de Manchester et ne parlant que de l’ennui horizontal de leur ville natale – dont le DVD serait un “outil promotionnel”. Odeur de kebab, sexe sordide, adolescence flinguée ou virées minables – c’est certain, Sheffield sort top-glamour des chansons des Arctic Monkeys.
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Avec son générique d’intro sépia, entre James Bond et Amicalement Votre, cet Arctic Monkeys at The Apollo est, d’entrée de jeu, un tournage à part : peu (ou pas) de présence du public, light-show principalement blafard et caméras sobres, il tranche radicalement avec la frime et la surenchère de plus en plus associées aux DVD live, où semblent bannis les plans de plus de deux secondes. Sans cet infernal et nauséeux ballet frimeur de caméras, il a le temps de s’attacher aux détails, avec un sens du temps et de l’espace que ne semblent saisir que les véritables réalisateurs (Jonathan Demme avec le Stop Making Sense des Talking Heads, le The Perfect Kiss de New Order et le Heart Of Gold de Neil Young ou Martin Scorcese avec The Last Waltz).
Du coup, débarrassé vicieusement du cahier des charges du genre (caméras en vol plané au dessus du public, impression surlignée de gigantisme et grimaces imbéciles des fans), cet Arctic Monkeys at The Apollo aurait presque pu être enregistré en local de répétition, le son restant suffisamment sec, nerveux et tendu pour ne pas succomber aux sirènes du stadium-rock.
Dans leur attitude, leur son, leur désinvolture goguenarde, leur dégaine même,les Arctic Monkeys semblent toiser de haut les dogmes du genre : habillés comme s’ils venaient de rentrer le bois pour l’hiver, ils jouent régulièrement dans l’obscurité, sans la moindre démagogie, sans inviter le peuple à taper dans ses mains. La municipalité de Sheffield peut être fière de son investissement : le nom de la ville n’est jamais cité.
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