Avec “The Darker the Shadow, the Brighter the Light”, Mike Skinner porte toujours un œil aiguisé sur la société britannique.
Le rap anglais est sans cesse frappé, bousculé, hybridé. Il a cette faculté d’être transformé par les interventions extérieures et a, comme toute musique, ses piliers, garants de ce goût pour la mutation. Mike Skinner est de cette trempe. En 2002, il sortait l’album Original Pirate Material sous le nom de The Streets, projet qu’il incarne presque entièrement, et assénait à la fourmilière un coup de pied dont on ressent encore aujourd’hui les vibrations.
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Le voici de retour avec The Darker the Shadow, the Brighter the Light, sixième album paru douze ans après le précédent et un long silence (à l’exception d’une mixtape en 2020). Accompagné d’un film du même nom, l’histoire d’un DJ plongé dans les méandres criminels d’un club londonien, ce nouveau volet discographique est saisissant.
Mike Skinner, Kae Tempest : mêmes combats ?
C’est bien simple : à chaque fois que Mike Skinner et ses collaborateurs historiques démarrent un titre avec du rap, le morceau change subitement de style, glisse alors vers autre chose. Ils jouent du synthétique, font entendre les claviers, les doigts qui les pressent, les pads qui retentissent, les boîtes à rythmes sèches et jamais strictes, presque live. Cet album offre un support très libre à la diction et à la voix de Skinner, que l’on pourrait, osons-le, désormais rapprocher de celles de Kae Tempest.
Quand une rythmique trap est explorée, elle est très vite transformée en dance, en grime ou en genre électronique sorti d’on ne sait où, comme s’il fallait toujours avancer. Les variations sont des surprises. Elles tiennent l’auditeur·rice en haleine parce qu’on est incapable d’anticiper ce qu’on entendra au prochain virage.
Skinner dépeint les embûches de l’ordinaire, rappelant que l’argent ne fait pas le bonheur
Mike Skinner est né à Birmingham, ville balèze qui rayonne pourtant peu dans le monde. Une cité-carrefour qui a vu les genres se télescoper, ce que l’on retrouve ici, passant du reggae digital aux tempos effrénés de l’Est londonien. Sur ce socle sonore, le rappeur multiplie les dictons et les mises en garde sans tomber dans le rap moralisateur.
Il dépeint plutôt les embûches de l’ordinaire, rappelant que l’argent ne fait pas le bonheur sur Money Isn’t Everything ou que l’errance dans les rues d’une ville amène son lot d’exceptionnel sur Kick the Can. En fil rouge, on devine le film pas encore visible, son personnage principal, son histoire urbaine et musicale. Quant à celle de Mike Skinner, elle trouve ici un nouveau chapitre, plutôt tourné vers son public déjà conquis, pour un album de son âge et de sa génération. Pertinent, évidemment.
The Darker the Shadow, the Brighter the Light (WEA). Sortie le 13 octobre.
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