Un piano, une Danoise et une collection de ballades à la pureté
désarmante : voici Agnes Obel, belle belle belle comme la nuit.
Sur la pochette de son album, Agnes Obel ne sourit pas. Elle pose : cheveux tirés vers l’arrière, regard bleu-vert austère, pull de grand-mère. Le fond est sombre, le visage pâle, l’air grave : pour un peu, on croirait observer un portrait mormon, une photo échappée de la série Big Love. Mais non. Agnes Obel, que les plus chanceux ont pu apercevoir sur la scène de la Boule Noire lors du dernier Festival des Inrocks, est danoise, et vit à Berlin depuis quelques années, avec deux pianos dans son appartement.
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Un deux pièces qu’on devine cosy et gentiment désuet, sans écran plat dans le salon, presque éclairé à la bougie. Sa musique, d’ailleurs, semble ne connaître la ville allemande que pour mieux faire le mur : on l’imagine plus souvent côtoyer les arbres que le béton. Car sur Philharmonics, son premier album, Agnes Obel joue des chansons pour la forêt, ou des chansons pour la nuit, ou des chansons pour les deux en même temps.
Nulle raison d’avoir peur pour autant : il y a, dans ces ballades à la mélancolie profonde, la clarté et la noblesse rassurante des disques de chevet. Obel chante dans les bois pendant que le loup n’y est pas, et le loup ne sait pas rare (Just So), mélodies flamboyantes apprises chez Erik Satie (Brother Sparrow, le déjà classique Riverside), comptines à col roulé : Agnes Obel pourrait être la petite soeur de Fredo Viola pour cette façon d’atteindre la lune avec des bouts de ficelle, de grimper l’Eyjafjöll à mains nues.
Solitaire, la jeune femme a des amis imaginaires formidables : elle revisite ainsi Close Watch de John Cale, et sa reprise, éclatante, semble faire convoler Scarlett Johansson et Keren Ann. Plus tard, sur un Over the Hill désarmant, Agnes Obel ne fait plus penser à personne, mais à elle-même. Ce qui est déjà formidable.
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