Trois morceaux, une interview : découvrez le rock nucléaire et mutant de l’un des plus brûlants groupes rock français du moment.
[attachment id=298]Un chanteur qui convulse comme Ian Curtis avec le timbre de Robert Smith, deux guitares furibardes, une basse prognathe, des synthés corrosifs, une batterie bodybuildée… La première fois qu’on a vu Adam Kesher sur scène, on s’est dit que The Rapture et !!! avaient fait des bébés ensemble en écoutant Weezer. Mais c’est à Bordeaux que le rock à ressorts de ce sextuor flamboyant a vu le jour en 2002. Après deux excellents maxis électro-rock (Modern Time, Allegory of Chastity) sur le label parisien Disque Primeur, le groupe prend la poudre d’escampette avec Heading For the Hills, Feeling Warm Inside : un premier album mutant et magmatique qui vacille du r’n’b à la new-rave, de Loudon Wainwright, à The Jesus & The Mary Chain et les Pixies -quelque part entre la fête et le désespoir.
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Découverte en deux étapes : musicale avec trois morceaux en écoute, et textuelle avec une rencontre chorale avec Julien, Gaétan, Jérome et Yann.
Local Girl
Ladies, Loathing and Loghter
Interview
Dans quel état d’esprit avez-vous composé Heading For The Hills… ?
Sur les premiers maxis, on nous a collé une étiquette post-punk qui ne correspondait pas vraiment à l’ampleur de nos influences musicales. Nous voulions changer radicalement de registre et éviter à tout prix la linéarité. Cet album s’inspire de la dramaturgie des albums de hip hop où des chansons sirupeuses cohabitent avec des morceaux plus clubs et gangsters. Il fallait que l’ensemble déploie des influences différentes et que l’émotion générée soit multiforme.
Local Girl, le titre inaugural, est en effet très marqué r’n’b…
En fait, on adore les Black Lips car ce groupe de garage américain est fan de crunk. L’idée était de faire un morceau r’n’b, mais qui sonne comme du psyché. En outre, les paroles prennent le contre-pied exact des sujets qui tiennent habituellement à cœur aux producteurs de r’n’b du genre « Attention ! Cachez vos filles, on arrive ! ». Elles sont influencées par Motel Blues, un morceau de Loundon Wainwright, chanteur folk des années 70 et papa de Rufus, qui parle de musiciens déracinés sur la route et retrouvent dans les amours d’un soir une forme de tendresse indispensable.
La route, justement… Vous avez joué au festival texan South By Southwest et beaucoup tourné outre-Manche, qu’avez-vous retiré de cette expérience ?
C’était génial ! Nous avons essayé de dépasser le complexe des groupes français qui n’osent pas sonner fort et de prouver qu’ici aussi, on peut jouer avec les clichés du rock sans se prendre au sérieux. En France, il n’y a pas de gros public pour notre musique. C’est pour cette raison que nous nous voulons nous faire connaître en Angleterre et aux Etats-Unis. Pourquoi avez-vous quitté la ville de Juppé pour celle de Delanoé ? Nous sommes très fiers de Bordeaux, mais ce n’était pas très pratique pour organiser nos tournées et travailler avec notre label Disque Primeur. Bordeaux vit par ailleurs un certain déclin culturel depuis quelques années. De nombreux clubs et bars comme le Zoobizarre ou le Jimmy’s ont fermé. Disons que la ville est en train de vivre ce qu’a vécu l’empire romain avant de devenir le royaume du panini.
Mais au fait, c’est qui Adam Kesher ?
Tout le monde pense que c’est Julien (le chanteur) alors qu’il n’est pas du tout juif new-yorkais ! En fait, c’est le nom du réalisateur dans Mulholland Drive de David Lynch qui résiste contre la grosse machine hollywoodienne. Ce type essaie de faire un film comme il l’entend, mais on lui impose une actrice. On s’est dit que ça arrivait à pas mal de groupes d’être ainsi tiraillés entre leur liberté d’expression et la pression des maisons de disques…
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