Réunis dans le cadre d’une soirée Stage Of The Art, l’ex-Modly Peaches et l’ancien Libertines s’en sont donné à cœur joie pour transformer leur concert en spectacle comique. Retour sur le show aussi drôle que bordélique des deux trublions, interview en prime.
[attachment id=298]La rencontre s’annonçait épique. Elle s’est finalement transformée en joyeux bordel totalement hors de contrôle. D’un côté, Adam Green, 28 ans, crooner anti-folk new-yorkais anciennement membre des Moldy Peaches. De l’autre, Carl Barât, 31 ans, dandy londonien au regard bleu piscine, ex-moitié nerveuse des Libertines, ex-leader des feu Dirty Pretty Things. Réuni pour la première fois sur scène pour un concert exceptionnel au Centre Pompidou, le duo de choc n’en était pourtant pas à sa première collaboration. Après s’être repris l’un l’autre – What A Waster des Libertines pour Green ; Who’s Got The Crack ? des Moldy Peaches pour Barât en duo avec Pete Doherty -, Arte leur avait déjà consacré, en 2005, un hilarant documentaire, One Night With Carl Barât and Adam Green. Les deux complices y écumaient les bars et boutiques de Londres, et dévoilaient leur complicité à grand renfort de câlins, de litres de bières et de plaisanteries douteuses. « La seule chose qui nous sépare, ce sont les kilomètres. Carl et moi, c’est une affaire qui roule. Si je devais emmener quelqu’un sur une île déserte, ce serait Carl. Nous somme très proches, c’est un bonus pour nous mais un problème pour tous les autres. Nous collaborerons ensemble jusqu’à notre mort, ce qui devrait arriver dans peu de temps » ricane Green après le concert, la tête amicalement posée sur l’épaule de son partenaire.
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Organisé par Stage Of The Art, les retrouvailles parisiennes des deux comparses promettaient donc de beaux moments. Après une première partie de Laura Gibson, Adam Green débarque accompagné de son groupe. Le New-Yorkais, bondissant aux quatre coins de la scène, à l’air en grande forme. Il interprète quelques titres (Broadcast Beach, Drugs, Gemstones) mais s’arrête pourtant de chanter à la fin du troisième morceau, Nat King Cole, prétextant d’avoir perdu sa voix. Seul devant l’écran géant où les dessins de David West prennent forme en direct, Green empoigne une guitare et se lance dans un set acoustique qui donne le ton de la suite du concert : à côté de ses pompes, l’Américain oublie les paroles de ses chansons, multiplie les fausses notes et pouffe de rire à la moindre occasion, demandant même au public de l’emmener à l’hôpital pour recevoir une bonne dose de codéine, sur laquelle il semble s’être déjà bien lâché. Si les morceaux sont un peu gâchés par les erreurs de Green (Tropical Island est littéralement massacrée), le bonhomme, croisement folk de Gaston Lagaffe et de Pierre Richard, se révèle cependant un génial entertainer malgré lui : les éclats de rire fusent dans la salle au moindre mot qui sort de sa bouche. Drôle, certes, mais plutôt décevant quand on connaît le vrai potentiel du garçon et ses talents de songwritter.
[attachment id=298]L’arrivée de Carl Barât relance la machine. Amis depuis sept ans, les deux musiciens se sautent dans les bras, avant que Barât n’attrape Green pour l’embrasser sur la bouche devant les cris du public. Soutenu par le groupe d’Adam, de retour sur scène, Barât et Green tentent tant bien que mal de reprendre Blood Thristy Bastards des Dirty Pretty Things. C’est sans compter le talent d’Adam Green pour semer la pagaille : oubliant de nouveau les paroles, le New-Yorkais ne tient pas le rythme, tandis que Barât, lui, essaie de rattraper le coup pour donner un semblant de cohérence au titre. « J’ai fait pire que d’habitude ce soir. Je suis connu pour ça ceci dit » expliquera plus tard Green. « J’étais un peu énervé, confie Barât, aucune des guitares ne fonctionnaient… à cause de toi. Mais je t’aime quand même Adam« .
Green quitte Barât qui entame alors son set acoustique. Rejoint par une violoniste et une violoncelliste, le dandy, chapeau vissé sur le crâne, joue tour à tour des morceaux des Libertines (Ballad Of Grimaldi, Music When The Lights Go Out, Time For Heroes), et des Dirty Pretty Things (9 Lives, Come Closer). Sans groupe depuis le split des Dirty Pretty Things, il profite de l’occasion pour présenter un aperçu de son futur album solo en jouant deux titres pas totalement convaincants, So Long My Lover et We Are All Heroes. Charismatique, le Londonien force pourtant trop sur sa voix et ne semble pas très à l’aise seul sur scène, sentiment qu’il confirmera après le show : « Je travaille sur mon album en ce moment. J’espère qu’il sera fini d’ici la fin de l’année. Ce que tu as vu ce soir était très bordélique, les titres sont meilleurs d’habitude. C’est la première fois que je fais quelque chose seul. Je me sens à poil. Ca me terrifie d’être seul, mais il faut que je le fasse, c’est un défi personnel. J’apprends beaucoup. Je ne pouvais plus vivre dans cette obligation de faire des tubes, de vendre des albums de toute façon. La vie avec un groupe est usante. » Les Libertines ? « On verra plus tard. Pete et moi nous étions mis d’accord pour reformer le groupe, puis finalement, ce n’était pas le bon moment, nous n’allions pas le faire pour les bonnes raisons. Si je dois reformer les Libertines un jour, ce sera pour de bon, pour vivre l’aventure à fond et être les Libertines de nouveau. Les Libertines ne sont pas un groupe, c’est une façon de vivre« . Après avoir malheureusement essuyé de nombreux problèmes de son – aucune guitare ne semblent fonctionner correctement – Barât finira par prendre une guitare électrique pour terminer sa prestation.
[attachment id=298] »On devrait appeler Adam non ? Adaaaaam ! Adaaam bordel » hurle Barât. « J’étais à l’hôpital » lance le New-Yorkais, hilare, en regagnant la scène. L’Américain tente de convaincre Barât de faire le lapin – un classique dont il gratifie son public à chacun de ses concerts. Devant la résistance amusée de Carl, il abandonne ses pitreries et interprète brillamment Friends Of Mine des Moldy Peaches, avec son complice. Séparé de nouveau de Barât, Green se lance alors dans un numéro comico-bondage : à l’aide d’un rouleau de scotch abandonné par l’un des techniciens, le chanteur s’enroule la jambe de Chatterton, puis, désespéré, convie deux personnes du public à le rejoindre pour leur ligoter les poignets et les chevilles. Le concert se poursuit dans une ambiance chaotique que seul Adam Green peut provoquer. Le set, aussi cocasse que touchant, finit néanmoins par lasser lorsque Green, reprenant des forces, attache sa propre guitare au pied de micro avant de la fracasser sans raison par terre et de disparaître. « On voulait faire mieux que ça, je te jure. On avait demandé des danseurs et un magicien, un magicien français. Ils nous ont répondu qu’ils ne pouvaient nous trouver qu’un magicien pour enfants. A ton avis, qu’est-ce que j’ai répondu ? Va pour le magicien pour enfants ! Finalement, ça ne s’est pas fait… » raconte plus tard le New-Yorkais. « Moi, je ne voulais pas de ce magicien pour ne pas mettre le public mal à l’aise » rajoute Barât avant d’être coupé par Green : « Mais j’ai quand même mis le public mal à l’aise Carl !« .
Décontenancé, les spectateurs du Centre Pompidou en redemandent pourtant. Les deux acolytes réapparaissent alors sous les applaudissements pour reprendre l’explosif What A Waster des Libertines, et Kokomo des Beach Boys. Le duo fonctionne enfin parfaitement, mais sera de courte durée : Barât quitte la salle laissant Adam Green scotcher le public en guise de conclusion. Un concert unique, qui laisse pourtant sur sa faim : Adam Green et Carl Barât, duo comique de l’année ?
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