La meilleure bande-son electro de Londres 2012 ? L’album d’Actress, un garçon qui dérègle les sens.
C’est la pochette, glaciale et martiale, qui a d’abord sauté aux yeux. Parmi les autres pochettes, dans leur explosion de couleurs et leur logorrhée de logos, elle suppliait chez ce disquaire londonien de l’extraire de la masse : on avait envie d’aimer ce disque, le troisième d’Actress, avant même de l’écouter.
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La première écoute provoqua la même impression : un sentiment de rigueur, de réflexion profonde sur la musique et le son au milieu de tant de frivolité, de tant de frime vaine. Le contenu à la hauteur des espoirs suggérés par le contenant, cette façon unique de le résumer, de le prolonger : la qualité des grands artworks, de Factory à Warp. Electronica luxuriante qui mime le désert, dusbtep effondré qui singe l’euphorie, la musique d’Actress est un labyrinthe qui joue avec les nerfs.
Cette symphonie pour cauchemars urbains et matins blêmes est œuvre de Darren Cunningham, déjà repéré aux côtés de Damon Albarn au Mali ou sur un remix de Radiohead. Elle appartient autant au salon qu’aux dance-floors, à la tête qu’aux jambes : Cunningham passe d’une installation à la Tate Modern aux clubs les plus escarpés de son sud londonien, bastion de l’insurrection sonique.
Avec ce mélange de douceur et de chaos, de plénitude et d’anxiété, elle prolonge les plages ouvertes par Burial sur les rives de la Tamise : une musique immatérielle qui se vit physiquement, étale et pourtant agitée, qui ne rêve éveillée que d’un œil. Pas étonnant qu’à la Tate elle ait accompagné la rétrospective de la peintre Yayoi Kusama : dans toute sa majestueuse lenteur, elle aussi provoque hallucinations et troubles sensoriels, fait des bulles de couleurs et ouvre des trous noirs.
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