On réhabilite Gary Numan, reconnu top-ringard officiel des eighties par les autorités. Une bonne raison de le réévaluer. Un journaliste français avait alors trouvé une formule admirable pour décrire Gary Numan : “Le Darty de la cold-wave”. A l’époque, c’était une passion inavouable, le truc franchement dégradant : dans la rue, Gary Numan se serait […]
On réhabilite Gary Numan, reconnu top-ringard officiel des eighties par les autorités. Une bonne raison de le réévaluer.
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Un journaliste français avait alors trouvé une formule admirable pour décrire Gary Numan : « Le Darty de la cold-wave ». A l’époque, c’était une passion inavouable, le truc franchement dégradant : dans la rue, Gary Numan se serait pris des pierres de toutes les factions du rock, pour une fois unies dans le rire gras, le sarcasme méchamment mérité. Car franchement, Gary Numan, croisement entre Kraftwerk et le Muppet show, Bowie et La Septième compagnie au clair de lune, frisait allégrement le ridicule, avec ses petits costards cintrés, sa gueule de mérou surgelé et son fond de teint chouravé à Marceau. C’était les années new-wave et franchement, on n’avait pas souvent l’occasion de rire alors on lui foutait des coups de pied dans le ventre, comme les autres, alors que le pauvre Numan était à terre. Et ce, même si, à la maison et dans la plus grande honte, on se surprenait à écouter Down in the park, We are glass, Are friends electric’ ou Cars. On n’était visiblement pas seuls. De l’ambassadeur du Bon Goût Damon Albarn (épaulé ici par Matt Sharpe, auteur d’un album très numanien avec ses Rentals américains) à l’indiscutable Beck (tristement absent de cette compilation), la fatwa contre le pestiféré se lève peu à peu, Untel avouant le trouver « drôle », tel autre lui reconnaissant quelques chansons plutôt « funky », voire « géniales » on entend grincer les dentiers de quelques vieux gardiens du temple rock, déjà sacrément amochés par les réhabilitations, via des albums hommages, de Joe Dassin ou des Carpenters. Pour augmenter dangereusement leur consommation de Polident, on dira que l’on est très contents de retrouver Gary Numan, toute honte bue. Que portées par Underdog, Moloko, Dave Clark, Posh (Placebo déguisé en homme ?), Towering Inferno, Saint Etienne ou Bis, ses vieilles frusques de maquereau rital ont une sacrée allure, une coupe moderne et séduisante. Que l’on est ravis d’entendre ses chansons aussi bien traitées (An Pierlé, Magnetic Fields, Kenickie), chagrins quand on se moque d’elles (Earl Brutus, EMF) et même un rien furibards quand des brutes (Gravity Kills, Pop Will Eat Itself) leur font du mal une belle hypocrisie, quand on se souvient à quel point on a toujours été partants pour latter nous-mêmes aveuglément l’infortuné Youri Gagman. Avec une découverte cocasse à la clé : joué à la guitare sèche ou couillument électrique, Gary Numan était plus qu’un clown blanc, mais aussi un imprévu (aïe) songwriter. Que les fantômes de Nick Drake, Tim Buckley, Phil Ochs ou même Mike Brant nous pardonnent cet égard de langage, il est à mettre sur le compte d’un enthousiasme bien excusable : Jimi Tenor chantait Down in the park. Merveilleux. Peut-être.
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