Entouré d’invités de tous horizons, l’un des plus grands groupes de rap de l’histoire effectue un retour tonitruant.
En trois albums, les New-Yorkais A Tribe Called Quest ont installé
une tendance lourde du rap nineties : un boom-bap impassible, chargé de soul souple plutôt que de funk incisif, serti d’une indicible joie de rapper pour la beauté du geste. Avant de s’enterrer brusquement : dissensions internes et manque de créativité face à un mainstream devenu excitant ont eu raison d’un trio mettant péniblement en boîte deux ultimes sorties sans intérêt. Pire : le rêve disparaissait définitivement en mars 2016 dans la tombe du MC Phife Dawg. De fait, lorsque Q-Tip annonça un nouvel essai surchargé d’invités-superstars, c’était entendu : on avait affaire à un triste “album de la réunion” comme en tirent régulièrement des MC accrochés à des gloires déchues.
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Un rap cool bercé de jazz, de soul et de wordplay facétieux
On se plantait complètement. Sur cette sortie enregistrée en famille (Jarobi, disparu depuis le premier album, est de retour tandis que Busta Rhymes
et Consequence rôdent à nouveau autour du micro), la tribu retape avec brio ses plus belles heures : le breakbeat sent toujours la poussière, le sampling 12-bit force le contraste avec les traitements lisses du rap actuel et le bpm demeure préhistorique. Entre les basses alourdies qui rappellent leur album The Low End Theory, un généreux sampling soul et ce rap contact bluffant qu’échangent encore Tip et Dawg – enregistré avant son décès –, c’est l’espoir Natives Tongues tout entier qui renaît, ce rap cool
bercé de jazz, de soul et de wordplay facétieux.
Ca sent le challenge lorsque Busta fait face à Tip, lorsque Kendrick Lamar
se risque dans le studio, que pleure la gratte de Jack White ou qu’Ali Shaheed Muhammad scratche comme un obsédé une célèbre note de cithare de Rotary Connection. Une fraîcheur, une émulation auxquelles on ne s’attendait pas/plus : Tribe fait du Tribe comme en 1993 et nous avons tous 17 ans. Peu importe la mode, la trap et le reste : We Got It from Here est simplement un excellent disque de rap, une petite bombe vintage sans
être passéiste. Qui le ferait mieux que Tribe, après tout ?
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