Entre folk-rock psyché, synth-wave mélancolique, pop-queer engagée, soul ou encore rock à la française, retrouvez notre sélection des meilleurs albums de la semaine.
Planningtorock – Powerhouse
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Powerhouse, le nouvel album de Planningtorock, est traversé de r’n’b, de house et de dance mais ne se départit jamais de son goût pour l’expérimentation, la surprise, le détour. On le sent dans la voix spectrale, ni masculine ni féminine, de Jam Rostron, que l’on aurait davantage imaginée bourrée d’Auto-Tune, alors qu’elle surgit du pitch shifting, cet effet audio permettant de modifier la fréquence d’une voix afin qu’elle sonne plus aiguë ou plus grave que son timbre d’origine.
Échappant au genre comme au cadre spatio-temporel, d’une profondeur universelle et d’une gravité robotique, cette voix imprime paradoxalement sa bouleversante humanité à l’album. Autant vous prévenir : on n’en sort pas indemne. Le génie de Powerhouse réside dans sa capacité à concilier une efficace sobriété et des mélodies synthétiques de club à des expérimentations vocales hyper politiques. Comme lorsque Jam répète inlassablement “non-binary femme” sur un beat tout aussi répétitif, tel un mantra, une invitation, une réflexion en plein dance-floor. Ou comme ce morceau titré Transome, mot-valise réunissant “trans” et “handsome” (beau/belle), inspiré de le chorégraphe allemand Ian Kaler, qui l’emploie dans sa performance LIVFE.
Retrouvez l’intégralité de la critique de Carole Boinet.
Powerhouse est à écouter sur Apple Music.
Muddy Monk – Longue Ride
Entre synth-wave et variété synthétique, le jeune suisse Muddy Monk nous faisait déjà voyager il y a trois ans avec la sortie d’un tout premier ep, puis des précieux L’Aventura et Si l’on ride l’année suivante. L’été dernier, c’est aux côtés de Myth Syzer qu’on le redécouvrait dans l’entêtant single Le Code. C’est donc avec une certaine impatience qu’on attendait de découvrir son tout premier album. Et Longue Ride, premier grand projet qui s’entend comme l’aboutissement de ces différentes années de travail, valait largement le coup de patienter.
Dans un univers ultra mélancolique, l’album reflète une longue aventure, un road-trip romantique opéré entièrement en solo par le producteur suisse qui ne dévoile aucun featuring. Sur fond de synth-wave magnétique, on se laisse happer par ces plages sonores planantes et rêveuses, entre romance poétique et synthés analogiques. Un disque aventureux, qu’on écoute à grande vitesse, et qui n’a aucun mal à apporter sa dose de modernité à la variété française.
Maud Gautier
Longue Ride est à écouter sur Apple Music.
Radio Elvis – Ces garçons-là
L’équipée sauvage, menée par le talentueux songwriter Pierre Guénard, a troqué le style Petit Bateau des Conquêtes, premier album sorti en 2016, pour un style plus affirmé, entre les Outsiders de Coppola et le Dutronc des années Vogue, à l’image d’une empreinte musicale qui prend, avec ce deuxième album, une dimension inédite dans la courte histoire de Radio Elvis.
Insouciant à l’époque, le groupe, passé par les Inrocks Lab en 2014 et auréolé d’une Victoire de la musique en 2017, catégorie Album révélation, s’inscrit ici dans la filiation rock du parcours initiatique adolescent, marqué au fer rouge par Ces garçons-là, premier single en forme de cavalcade. En découlent toutes les problématiques de combat (La Sueur et le Sang, 23 minutes) et d’errance (New York, Nocturama, Prières perdues) d’un album plus âpre et plus complexe que la délicatesse de ses arrangements et la beauté de son écriture ne laissent présager.
Retrouvez l’intégralité de la critique de François Moreau.
Ces garçons-là est à écouter sur Apple Music.
Camélia Jordana – Lost
Camelia Jordana signe enfin son retour dans l’univers musical avec Lost, un projet ambitieux en collaboration avec le saxophone et le clavier de Laurent Bardainne, membre de Poni Hoax. À la fois hybride et engagé, ce nouveau disque est une véritable pépite. Les instrus y sont minimalistes, mais extrêmement travaillées, mêlant des influences de musique traditionnelle arabe, de jazz, d’électro, d’expérimental et de hip-hop. L’envoûtante et insaisissable voix de Camélia y flotte, tel un chant absolu, et s’exprime entre français, anglais et arabe.
Cette dernière langue fut indispensable dans la création de cet album, Lost étant le témoignage de Camélia Jordana en tant que femme d’origine nord-africaine vivant en France. Elle y dénonce le contrôle au faciès dans le magnifique Freestyle, l’assassinat des jeunes afro-américains par les policiers aux États-Unis dans Freddie Gray, le racisme ambiant dans Empire, ou encore le combat des femmes dans A Girl Like Me. Ces dernières chansons, ajoutées à Ena, Dhaouw et Do Not Choose, font d’ailleurs partie des titres les plus ensorcelants de l’album. À écouter sans modération.
Salomé Grouard
Lost est à écouter sur Apple Music.
Charles Bradley – Black Velvet
Black Velvet, du nom de scène qu’il portait avant de chanter sous son vrai nom, nous rappelle plusieurs choses : d’abord qu’on a trop souvent comparé Charles Bradley à James Brown. Une facilité en partie due à ses performances scéniques où son talent s’étalait aux yeux du public plus qu’en studio. En fait, c’est plutôt d’un Otis Redding qu’il se rapprocherait. Ensuite, les albums de Charles Bradley pouvaient être inégaux, comme souvent dans la soul. Celui-ci ne déroge pas à la règle, mais c’est ce qui est fort avec lui : les imperfections et les arrangements parfois convenus sont secondaires tant on lisait la douleur dans ses textes et ses mélodies.
Le single I Feel a Change, sorti en septembre, est l’une des plus belles pièces de Black Velvet. Une ballade à la basse ravageuse, qui fait réellement démarrer l’album, mais qui fait surtout partie des compositions inédites recensées ici, à l’instar des Luv Jones, Can’t Fight the Feeling ou la superbe Fly Little Girl. Mais puisque l’histoire de la soul est teintée de reprises et de standards, rien d’étonnant à entendre Charles Bradley distiller, autre temps fort, sa propre version du célèbre Heart Of Gold de Neil Young.
Retrouvez l’intégralité de la critique de Brice Miclet.
Black Velvet est à écouter sur Apple Music.
J Mascis – Elastic Days
Après le retour de Dinosaur Jr. et de son noise-rock alternatif, il semblerait que le leader du groupe ait eu besoin de trouver un nouveau moyen de perfectionner son doux folk-rock aux accents psyché qui lui était devenu propre. Elastic Day, 3e album solo de J Mascis, est composé de sons délicats et d’expérimentations acoustiques, qui associent calme et intensité, passion et sincérité, folk-rock et transe psyché. Sa voix, légèrement cassée par le temps, mais plus mélodieuse que jamais, change très peu d’intensité contrairement aux guitares qui l’accompagnent.
Résultat : un doux mélange transpirant la mélancolie, auquel ont participé le pianiste Ken Maiuri, le chanteur et guitariste Pall Jenkins, le leader de Miracle Legion Mark Mulcahy et Zoë Randell de Luluc. L’album s’ouvre sur le superbe See You At The Movies, et enchaîne avec des titres aux influences jazzy comme Give It Off et des ballades pastorales comme Web so Dense.
Salomé Grouard
Elastic Days est à écouter sur Apple Music.
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