Quand il était gamin, Roger Martin Patrick Quigley avait pris l’habitude de sonner très tôt chez Mark E. Smith de The Fall jusqu’à ce que celui-ci craque et lui offre une place en première partie de ses concerts. Dix ans plus tard, Quigley frappe toujours à la porte des idoles de Manchester dans l’espoir de […]
Quand il était gamin, Roger Martin Patrick Quigley avait pris l’habitude de sonner très tôt chez Mark E. Smith de The Fall jusqu’à ce que celui-ci craque et lui offre une place en première partie de ses concerts. Dix ans plus tard, Quigley frappe toujours à la porte des idoles de Manchester dans l’espoir de les rejoindre. Il a le temps et presque tout pour lui : le flair, les mélodies amies du siffleur et le don suprême d’une voix évoquant un Morrissey rêveur, réservé. Las, le temps se couvre pour les songwriters anglais. Après avoir financé quelques singles grâce à ses gains au tiercé, le grand homme sort son premier album sur le petit label tourangeau Acétone. Il habille ses chansons comme Arab Strap ou Durutti Column : avec des arpèges compliqués, des boîtes à rythmes. A l’occasion, on découvre que Quigley s’est fait des copains à force de regarder en l’air ces oiseaux dont on trouve la présence bucolique sur bon nombre de titres. S’il marie là pop et ambient comme aucun post-rockeur n’ose l’envisager, on choisit de le préférer simple et réaliste comme sur le A Kind of loving qui nous l’a fait découvrir. Ce titre est ici retravaillé d’une voix blanche, qui se planque derrière une batterie soudain devenue obèse. Un écueil vite rattrapé par cette profusion de perles pop l’agile Laziness enregistré dans un bain trop chaud, l’aérien Obsessed. Ailleurs, Quigley tire toutes les ficelles qui se présentent à lui, s’essaie à la techno-pop sur Sahara, au folk sur My luck is turning une belle chanson triste comme Nick Drake en écrit peut-être encore sur son nuage. Sa musique évoque enfin celle des Smiths lorsqu’il sort de sa réserve et se laisse aller à quelques pirouettes sur Mr in between. On aurait d’ailleurs bien aimé en faire l’égal d’un Morrissey, on en fait pour cette fois un Durutti Column aux mélodies survitaminées. « Trop de couleur distrait le spectateur », comme disait l’autre. Ainsi, on aurait peut-être préféré que 1969 to God knows when ne frappe que par ses mélodies, que Quigley ne s’en tienne qu’à la pop alors que son disque fascine par sa variété, sa retenue, son aspect lancinant et bucolique. Quigley fait penser à celui qui, voyant soudain les portes s’ouvrir devant lui, se prend les pieds dans le paillasson et réalise que l’on doit être prudent dans le choix de ses rêves parce qu’il ne reste plus rien à espérer lorsque ceux-ci se réalisent.
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