Outre la nécessité d’une aide d’urgence, les libraires réclament des mesures structurelles. Les professionnels détaillent ce qu’elles pourraient être.
Le 6 mai, le ministre de l’Economie Bruno Le Maire s’est entretenu avec le Syndicat de la librairie française (SLF). Il préparerait un plan en faveur des libraires, compensant ainsi l’absence de proposition concrète du discours présidentiel sur la culture, où il a été plutôt question de spectacle vivant. Guillaume Husson, délégué général du SLF, le confirme : “On attend toujours des annonces et des actions.”
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Il souligne la fragilité économique de la profession : “Les libraires font très peu de marges et dégagent peu de bénéfices. Il ne faut pas que les problèmes de trésorerie se transforment en problème de solvabilité.” Autrement dit : si on n’injecte pas d’argent, un certain nombre de librairies sont susceptibles, à terme, de devoir mettre la clef sous la porte.
“Je ne suis pas certain que les clients vont se ruer dans les librairies”
Aussi, le SLF réclame une “neutralisation” des deux mois d’arrêt d’activité. Pierre Delaforge, à la librairie Les Arpenteurs à Paris, fait remarquer que dans d’autres pays on a supprimé les charges des commerçants tenus de fermer boutique pour deux mois. S’il ne craint pas la fermeture, il prévoit des mois difficiles : “Je ne suis pas certain que les clients vont se ruer dans les librairies. De notre côté, nous ne prendrons pas de vacances cet été.”
La question en effet est à envisager sur du long terme. Certes, jeudi 7 mai a été annoncée la suppression des charges sociales pour les petites entreprises ayant dû fermer durant le confinement. Mais, selon le SLF, une telle mesure est insuffisante, car d’autres frais subsistent : “Les loyers, les abonnements téléphoniques et informatiques, par exemple”, liste Guillaume Husson. Des prêts bancaires ont pu être accordés, qui décalent les échéances. Aussi, des problèmes risquent de surgir dans quelques mois. Frédérique Pingault, à la Librairie du Tramway à Lyon, le confirme : “C’est en janvier ou février que cela va coincer s’il n’y a pas d’aides supplémentaires.”
“L’Etat a accordé 2 millions d’euros, mais nous réclamons un fonds de soutien de 20 à 25 millions”
Pour l’instant, seules les structures en grande difficulté ont pu être soutenues. “L’Etat a accordé 2 millions d’euros, explique Guillaume Husson. Mais nous réclamons un fonds de soutien de 20 à 25 millions.” Les libraires regrettent aussi l’absence d’aide concrète pour la réouverture :
“On aurait souhaité du gel et des masques, la mairie ne nous en a distribué qu’une vingtaine”, explique Pierre Delaforge. “Nous avons cousu nous-mêmes des masques pour nos vendeurs, confirme Frédérique Pingault, et je me suis arrangée avec ma pharmacienne pour qu’elle me procure un bidon de 5 litres de gel.”
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Le SLF réclame aussi des mesures structurelles comme supprimer les 9 % de remise que les libraires doivent accorder aux bibliothèques publiques. Selon Guillaume Husson, cela ne représenterait pas un sacrifice énorme pour les collectivités locales mais serait vital pour les libraires.
En outre, le SLF réclame une modification de la loi Lang sur les remises que les éditeurs accordent aux libraires, pouvant atteindre 40 % pour les chaînes. “Il faudrait que soit introduit le principe d’une remise minimale de 36 %”, dit Guillaume Husson. Un principe que Gallimard et Actes Sud ont déjà accepté d’appliquer pour soutenir les librairies indépendantes. Et les autres éditeurs ? “Si on demande que la loi soit modifiée, c’est bien parce que ça coince dans les négociations”, note Guillaume Husson.
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