Avec “Érections présidentielles”, le dessinateur néerlandais rappelle que dans le domaine de la satire mordante, il a peu de concurrence.
Non, ce n’est pas parce que Willem a passé les 80 ans qu’il va s’assagir. Certes, l’année dernière, il a pris sa retraite de Libération, mettant fin à une collaboration qui, synonyme de milliers de dessins d’actualité acerbes, dura la moitié de sa vie. Réunissant certains de ses derniers traits vengeurs, Retenez-nous ! Ou on fera un malheur, paru chez les Requins Marteaux, prouve que, jusqu’au bout, ce chansonnier hardcore a su viser juste, croquant avec un appétit cruel les peurs et les tyrans de notre époque qu’il s’agisse de Poutine, d’Erdogan ou de la politique sanitaire française.
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Maintenant qu’il n’a plus l’obligation de livrer chaque jour un dessin féroce, l’artiste néerlandais revient à son premier amour, la BD coup-de-poing arrosée de napalm. Avec Érections présidentielles, il se livre à un jeu de massacre jubilatoire dont l’énormité de la farce fera rire tout en donnant des haut-le-cœur à une bonne partie de la classe politique française.
Il y revisite de manière très libre et obscène l’histoire de la Ve République, montrant un De Gaulle en panne d’érection, Chirac au Salon de l’agriculture ou un Hollande juché sur son scooter et surnommé le “bandeur casqué”.
Willem poursuit ce qu’il a entrepris dans les années 1970 ou 1980 : dépeindre des horreurs pour mieux faire ressortir l’absurdité et l’ignominie
Indéniable défouloir, cette orgie débridée et indécente ne se révèle pas totalement gratuite. Toujours animé par le même mauvais esprit, Willem poursuit ce qu’il a entrepris dans les années 1970 ou 1980 avec, entre autres, son personnage de Dick Talon : dépeindre des horreurs pour mieux faire ressortir l’absurdité et l’ignominie.
Entre les séquences pornographiques provocatrices et désopilantes, se glissent ainsi des dessins assassins qui en disent davantage que de longs discours sur des sujets tels que la colonisation, le chômage ou le “ruissellement”. Avec, en bonus, la participation de Coco ou de Vuilllemin, ce petit volume de la collection BD Cul – qui a récemment accueilli Florence Cestac pour un Ginette grivois – constitue un exutoire efficace à la médiocrité infinie du discours politique actuel.
Érections présidentielles de Willem (Le Monte-en-l’air/“BD Cul”), 128 p., 13 €. En librairie le 15 avril.
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