Le burn-out vous guette ? Paresseux de tous pays, unissez-vous ! Redécouvrez l’art de l’oisiveté avec la revue littéraire anglaise “The Idler”.
Face au surmenage et à l’injonction de rentabilité et de productivité que nous subissons, des écrivains et penseurs rebelles revendiquent aujourd’hui le droit à la paresse. “Spécialiste mondial de la sieste”, comme il aime à se définir, Dany Laferrière, de l’Académie française, publiait l’année dernière L’Art presque perdu de rien faire, “qui est ni plus ni moins un art de vivre”, précise-t-il. Et une excellente thérapie contre le workaholism.
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A l’heure où le burn-out est en passe d’être reconnu par l’Assemblée nationale comme une maladie professionnelle, Michel Rocard cite Paul Lafargue en modèle pour le XXIe siècle. “Une étrange folie possède les classes ouvrières des nations où règne la civilisation capitaliste. (…) Cette folie est l’amour du travail (…)”, écrivait le philosophe anarchiste dans son pamphlet Le Droit à la paresse en 1880. Le texte sera mis en scène à Avignon cet été, interprété par Hervé Colin. Il fait aussi l’objet de nombreuses rééditions, des éditions de La Découverte à l’excellente collection Ne travaillez jamais ! chez Allia, qui propose également les classiques sur le thème, de Robert Louis Stevenson (Une apologie des oisifs), Bertrand Russell (Eloge de l’oisiveté), Herman Melville (Bartleby) ou encore Clément Pansaers (L’Apologie de la paresse).
Chez les dandys, si Philippe Katerine chante “c’est extraordinaire, de ne rien faire, rien faire du tout, c’est un peu fou, mais il faut le faire”, il le doit sans doute à Oscar Wilde qui, le premier, décréta l’art de ne rien faire comme but ultime de toute vie réussie. Mais il faut rendre à César : ce sont bien les Anglais qui surent faire de l’oisiveté une sorte de qualité esthétique autant qu’une forme de littérature.
The Idler Academy a ouvert ses portes dans le quartier de Notting Hill
Série de textes initialement écrits par Samuel Johnson sous pseudonyme (“l’Oisif”), The Idler devint une revue dans laquelle sévirent, au XIXe siècle, Arthur Conan Doyle, Jerome K. Jerome ou Robert Louis Stevenson. Elle fut redécouverte il y a quelques années par un grand oisif british devant l’éternel, Tom Hodgkinson. Celui-ci la fit renaître de ses cendres, publiant tous les trois mois cette revue au graphisme soigné, devenue aujourd’hui un laboratoire d’idées, d’utopies et d’expérimentations loufoques qui compte notamment parmi ses contributeurs Will Self, Louis Theroux ou encore Damien Hirst.
Dandysme, second degré et contestation : on retrouve dans The Idler version XXIe siècle les qualités de l’ancienne revue. Elle s’est fait sponsoriser par une marque d’absinthe, a publié un numéro spécial sur les “villes les plus pourries d’Angleterre” et a érigé en héros de l’oisiveté des hurluberlus comme Homer Simpson, Kramer de Seinfeld ou encore Fat Freddy’s Cat de Gilbert Shelton (sans oublier Eric Cantona pour son côté rebelle).
The Idler a désormais ouvert son propre lieu, The Idler Academy, une librairie dans le quartier de Notting Hill, à Londres. On peut s’y inscrire et suivre des cours de pêche à la ligne, de ukulélé, de calligraphie ou de philosophie sur l’art de se la couler douce. On trouvera tout cela et les archives complètes sur le site de la revue.
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