Impossible de bouger pour le moment. Et même après le 11 mai, il ne sera pas possible de voyager comme avant. Si l’on peut bien sûr se réjouir de la réduction des trajets, donc des vols longue distance qui participent au réchauffement climatique, le désir de voyages et d’ailleurs, reste le même. Voici notre sélection de livres pour voyager dans sa chambre, sans prendre de risque ni en faire prendre à la planète.
Jack Kerouac, Sur la route
Le grand livre du voyage, de l’échappée belle, roman culte de la Beat génération et fondateur du mouvement hippie, à l’origine des bouleversements sociétaux des sixties, incarnation du désir de liberté d’une jeunesse. Ecrit en 1957, inspiré par le rythme du jazz, On the road raconte les trips de l’auteur à travers les grands espaces US, comme pour redessiner une nouvelle géographie, mentale, intime, non conventionnelle. Des rencontres (on y croise Burroughs, Ginsberg, Cassadi), l’amour libre, la musique, la drogue et l’alcool, le mouvement, autant de points traçant une nouvelle cartographie existentielle.
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Chimamanda Ngozi Adichie, Americanah
La nigérienne Chimamanda Ngozi Adichie avait déjà été remarquée pour deux romans situés en Afrique quand elle a écrit Americanah, grand roman sur la vie et les amours d’une jeune bloggeuse noire, Ifemelu, entre l’Amérique où elle s’est installée depuis treize ans, et le Niger d’où elle vient. Au début, elle décide de plaquer sa vie américaine pour revenir à Lagos. Pendant qu’un autre Africain, Obinze, fait le même parcours après trois ans en Angleterre. On naviguera entre flash-back et différents pays sans cesse au cours de cette fresque, mais ce sont les parties (importantes) situées au Niger qui sont les plus passionnantes, car Adichie nous entraîne dans la vie quotidienne des jeunes Africains d’aujourd’hui.
Bruce Chatwin, Le chant des pistes
Chatwin, c’est l’écrivain du voyage par excellence : un genre d’excellence dans les pays anglo-saxons, surtout en Angleterre où l’auteur de En Patagonie naît en 1922 – il mourra à Nice du Sida en 1987. Dans Le Chant des pistes, Chatwin se rend chez les Aborigènes, d’où vient l’homme, dans l’immensité du bush australien où il se perd pour mieux se retrouver face-à-face avec lui. L’aventure géographique est toujours, aussi, une aventure philosophique, et personnelle. Un récit somptueux.
Marguerite Duras, L’Amant
Une traversée du Mékong, Saïgon dans les années trente. Quand Duras fait le récit (en roman) de son enfance et adolescence en Indochine, avec sa mère et ses trois frères – un moment de sa vie et un pan de l’histoire des colonies Françaises qu’elle racontait déjà, romancé, dans Un Barrage contre le Pacifique – cela devient l’un des romans les plus puissants de la littérature Française. Prix Goncourt 1984, L’Amant nous entraîne dans plusieurs voyages : celui qui s’accomplit aussi dans les bras d’un riche Chinois, pour une traversée qui va de la jeunesse, et son cortège d’illusions, à l’âge adulte ; celui de entre le Chinois et la jeune française, celui entre les classes sociales ; et un voyage, enfin, dans la langue de Marguerite Duras.
Nellie Bly, Le tour du monde en 72 jours
Ce tour du monde en train à vapeur et en paquebot sera sans doute le plus grand voyage, et le plus exotique, que vous ayez jamais effectué, en chambre ou non. Et c’est grâce à Nellie Bly, pionnière du reportage undercover et du Gonzo journalisme, qui s’est lancé un défi en 1888 pour le compte d’un journal : battre Philéas Phogg, le héros de Jules Verne, sur son Tour du monde en quatre-vingts jours. Elle passe de l’Amérique à Amiens (où elle rencontre Jules Verne) puis Calais, Suez, la traversée de la mer rouge, Singapour, Hong Kong… Elle battra Fogg de huit jours.
Joseph Conrad, Lord Jim
Conrad est l’écrivain par excellence pour prendre la mer. Orphelin à onze ans, élevé par un oncle, il s’engage dans une carrière maritime à 17 ans en 1874, d’abord comme mousse, puis dans la marine marchande britannique. Avant d’écrire son chef-d’œuvre, Au Cœur des ténèbres, inspiré de son voyage au Congo comme capitaine d’un navire, il écrivait Lord Jim, un roman lui aussi, déjà, très inspiré de sa vie en mer. Jim, jeune officier de marine marchande, a abandonné en mer un bateau plein de passagers, et va passer le reste de sa vie en Asie à tenter de se racheter. Un texte qui annonce l’existentialisme.
Jay McInerney, Les Jours enfuis
Le chroniqueur du New York contemporain, c’est lui. Dès 1984 avec Journal d’un oiseau de nuit, il nous racontait les nuits cocaïnées et cool de Manhattan, à travers les aventures de son alter ego de fiction ; ses romans sont le feuilleton d’une ville en pleine mutation, de la tragédie du 11 septembre dans La Belle vie, jusqu’à la fin des idéaux voire des illusions dans Les Jours enfuis, qui nous montre un New York devenu hors de prix, aseptisé à force de gentrification, et où tout est devenu marchandise, même la littérature.
Emmanuel Carrère, Limonov
A travers le récit de la vie de Limonov, sorte d’aventurier haut en couleur, à la fois écrivain, poète, homme politique, aujourd’hui opposé au régime de Poutine, Emmanuel Carrère nous invite à arpenter la Russie (et son histoire) de Moscou où Limonov fut poète underground aux Balkans où il s’engage aux côtés des combattants serbes ; en passant aussi par Paris et New York, l’itinéraire d’un (anti) héros russe de notre temps.
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