Des grivoiseries dans un univers très british : Nicky parodie avec humour l’Angleterre de Blake et Mortimer.
L’un des principaux ressorts de la pornographie est de se glisser dans l’intimité de personnages ou d’institutions bien sous tous rapports pour en dévoiler les turpitudes cachées. Ce qui excite, c’est ce qu’on ne voit pas et qu’on ose à peine imaginer, l’envers inavouable du décor. Plus la comtesse est charitable, plus l’infirmière est dévouée, plus leurs frasques génèrent d’appétence.
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[attachment id=298]Trop commodes et trop opaques pour être honnêtes, les règles sociales, les corps constitués, les uniformes sont autant de paravents, collectifs et individuels, qui exacerbent l’imagination. Et quel univers plus codifié, élégant, civilisé et donc propice au fantasme, qu’un club britannique ? Nicky nous emmène donc au Royal Gentlemen Club, une institution réservée à une élite de savants, de militaires et d’hommes politiques. Dans ses salons lambrissés, où flotte l’odeur des cigares et du sherry, s’affairent, discrets et efficaces, un majordome libidineux et une gouvernante autoritaire.
Jolies filles et situations convenues
Bien entendu, toutes les jeunes filles qui y mettront les pieds, par hasard ou par profession (infirmière, secrétaire, policière…), y subiront les derniers outrages. Mettant en scène des pratiques et des situations convenues, Nicky ne déborde ni d’imagination ni de perversité. Pour autant, ses historiettes ne manquent pas d’attrait. Les filles sont jolies, vêtements et lingerie sont représentés avec un soin amoureux, et l’humour est omniprésent.
Avec ses chutes gentiment grivoises, ses dialogues châtiés et son trait au cordeau, Royal Gentlemen Club parodie savoureusement l’Angleterre idéale de la bande dessinée (Jacobs, Floc’h), et au plaisir de l’érotisme se mêle celui du pastiche. Dans la série Rocking Girls, qui complète cet album, Nicky reprend le même cocktail de charme et de dérision pour s’attaquer à un autre univers social et narratif ultrabalisé : l’Amérique des années 1950.
Dans des aventures tirées de mauvais pulps, peuplées d’extraterrestres curieux, d’égyptologues crédules et d’espions à la solde des Rouges, des mâles triomphants aux faux airs de Rock Hudson et d’aimables retraités abusent de ménagères dociles et gourmandes. Et, comme dans Mad Men, sous la drôlerie et les excès, affleure, pour le phallocrate qui sommeille en chaque homme, une pointe de regret.
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