Dans son nouveau livre, la philosophe autrice de l’essai culte “Trouble dans le genre” s’attaque à la question de la non-violence. Passionnant.
Dans le monde violent qui est le nôtre – qui l’est particulièrement pour les précaires, les femmes, les personnes LGBTQI+ et racisées –, pouvons-nous nous passer de la violence pour résister à ce qui nous oppresse ? À l’heure où les institutions et les États, comble du cynisme, qualifient souvent de “violentes” toutes les formes d’opposition à leur égard (les manifestations, les grèves, etc.), comment réussir à “lier une pratique de la non-violence à une force distincte de la violence destructrice” ?
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Voilà quelques-unes des questions posées par Judith Butler dans son passionnant nouvel essai, La Force de la non-violence. Avec son érudition et sa finesse habituelles, la philosophe américaine, autrice en 1990 de Trouble dans le genre, propose de repenser la non-violence non pas en tant que pratique passive, mais bien en tant qu’éthique politique collective – et agressive ! – tirant sa force de liens de solidarité et d’interdépendance entre les êtres, à rebours de la violence institutionnelle systémique.
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Convoquant Michel Foucault, Frantz Fanon ou encore Étienne Balibar, l’intellectuelle montre comment des personnes sont considérées comme “pleurables” ou non – si les exilé·es coulent au fond de la Méditerranée, c’est bien parce que leurs vies n’ont “pas de valeur” aux yeux de nos dirigeant·es –, cela rendant acceptable ou non la violence s’abattant sur elles. Pour Butler, notre imaginaire politique doit donc urgemment reconnaître l’égale “pleurabilité” de tous·tes, la non-violence en étant alors le corollaire.
La Force de la non-violence de Judith Butler (Fayard), traduit de l’anglais (États-Unis) par Christophe Jaquet, 256 p., 20€. En librairie.
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