La lutte pour les droits des femmes peut être à la base d’une révolution radicale. Sous la tutelle d’Angela Davis, un recueil de textes analyse le fonctionnement des mécanismes d’oppression.
S’inquiétant de la façon dont la notion de droit des femmes peut être utilisée par des islamophobes, Félix Boggio Ewanjé-Epée, Stella Magliani-Belkacem, Morgane Merteuil et Frédéric Monferrand, auteurs de la revue en ligne de théorie marxiste Période, ont rassemblé une dizaine de textes, anciens ou inédits, pour aborder de façon globale l’instrumentalisation du féminisme par le pouvoir dans les sociétés capitalistes. Et la résistance qu’il faut y opposer.
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Le recueil analyse en particulier les formes de sexisme inhérentes au monde libéral. La sociologue Sara Farris se penche sur les fondements socio-économiques de l’islamophobie. Elle constate que “la hausse dramatique des flux de migration féminine est due en grande partie à la demande croissante de travailleurs dans le secteur des soins, notamment en Europe”. Pourtant, poursuit-elle, le débat public est “dominé par une stratégie discursive insidieuse qui a tendance à obscurcir l’importance de ces femmes en tant que travailleuses domestiques et les représente plutôt comme victimes de leur propre culture”.
Prolongeant cette réflexion sur les liens entre libéralisme et oppression des femmes, l’universitaire Kevin Floyd s’inquiète du matériel biologique marchandisé – ovocytes, tissu fœtal – fourni par des populations de femmes pauvres, et du développement de la gestation pour autrui, “réalisée dans le Sud pour de riches consommateurs stériles du Nord”, qui constitue une forme de travail genré et racialisé “dans des régions du globe où les opportunités d’effectuer un travail salarié s’évaporent”.
Le féminisme instrument fondamental de la convergence des luttes
Un point de vue partagé par la militante féministe et sociologue Johanna Brenner, pour qui “la prostitution contemporaine est liée au capitalisme néolibéral mondial (…) Dès lors, il est important que les féministes qui s’intéressent aux prostituées rejoignent les luttes des femmes qui, dans le monde, se battent pour des réformes agraires, pour des changements dans le droit de la famille, pour les droits des travailleurs(euses).”
C’est en cela que le féminisme peut être vu comme l’instrument fondamental de la convergence des luttes, à condition qu’il ne soit pas au service d’une idéologie dominante. En un mot il est temps, pour les auteurs, de rendre au féminisme sa vocation révolutionnaire primordiale : renverser un ordre des choses supposé immuable.
Pour un féminisme de la totalité collectif, sous la direction de Félix Boggio Ewanjé-Epée, Stella Magliani-Belkacem, Morgane Merteuil, Frédéric Monferrand (Editions Amsterdam. collection Période), 424 pages, 20 €
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