Alors que “Guerre” paraît ce début mai, ce roman inédit de Louis-Ferdinand Céline volé à la libération et réapparu récemment, se pose toujours la même question : peut-on écrire du bien d’un écrivain qui fut aussi violemment antisémite, ou est-ce faire preuve d’une forme de négationnisme intellectuel ?
Peut-on se permettre d’aimer un écrivain d’extrême droite ? Ou ne peut-on le faire qu’à condition de rappeler qu’il multiplia les appels à la haine contre les juifs ?
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Le cas Céline prouve encore que nous avons un problème en France avec nos écrivains d’extrême droite. Nous ne savons pas quoi en faire. Dans tout l’appareil qui accompagne Guerre, jamais ne sont mentionnés les trois pamphlets antisémites dont l’écrivain lui-même interdit la réédition après-guerre pour faire oublier ses actions, blanchir sa réputation. Nous faut-il continuer à jouer son jeu afin de nous autoriser à le lire, à l’aimer ? Non. Bien sûr que non.
Pourtant, face aux auteurs fachos, l’impression que l’on oscille toujours entre quelques options, et pas toujours les meilleures. Certains refusent d’ouvrir les livres écrits par les auteurs collabos. D’autres brandissent Paul Morand, Drieu la Rochelle ou Charles Maurras comme des badges cool, les signes sulfureux de leur dandysme, de leur indépendance d’esprit. D’autres encore nous attaquent dès qu’on ose critiquer l’antisémitisme de tel auteur sous prétexte qu’il serait un véritable écrivain (voir l’affaire Renaud Camus). Et en janvier dernier, une majorité aura préféré rester aveugle aux remarques toujours excluantes sinon haineuses présentes dans Anéantir de Houellebecq. Oui, on peut être un grand écrivain et un salaud. L’un n’a jamais empêché l’autre et il faudrait arrêter de se tortiller sur sa chaise à ce sujet. La littérature, après tout, regorge de ce genre de paradoxes. Comme la vie.
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