A travers le journal d’un supposé agresseur de femmes, l’écrivaine compose un roman qui balaie les idées reçues sur la folie.
Martin John attaque-t-il véritablement des femmes dans le métro de Londres ou imagine-t-il ces crimes malgré lui, sa mère ne cessant de lui dire qu’il va inévitablement passer à l’acte ? Le deuxième roman (après Malarky) de la Canadienne Anakana Schofield plonge dans la tête d’un jeune homme dérangé et touchant, fragile, mais a priori inoffensif.
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Ce vieux garçon aux manies étranges (une fascination pour l’Eurovision, une peur incontrôlable de la lettre “p”) est martyrisé par “Mam” (sa mère), à tel point qu’il en perd les pédales.
A partir de ce thème somme toute classique (on pense à Psychose, ou plus récemment Joker), Schofield explore les recoins les plus sombres et les plus torturés de la psyché. Ecrit autant comme une sorte de journal de bord de son personnage principal que comme un Cluedo, Martin John laisse percevoir, entre les lignes, les failles et signes qui permettront au lecteur de se faire son idée. Sa forme audacieuse – mise en page décousue comme les pensées du jeune homme, langue penchant vers le métarécit et au lexique varié, semant le doute constant sur l’identité du narrateur – laisse l’imagination libre de concevoir tous les scénarios possibles.
Anakana Schofield va enfin à rebours de l’époque : là où l’on a tendance à réduire les “prédateurs sexuels” à des bêtes sauvages, lâchées dans la nature, l’autrice montre les pathologies, la misogynie de la société et de la culture, qui font de ce pauvre garçon la victime autant que le coupable idéal.
Martin John d’Anakana Schofield (Actes Sud), traduit de l’anglais (Canada) par Anne Rabinovitch, 368 p., 22,50 €
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