A partir de sa propre expérience, l’écrivain indo-américain Amitava Kumar lie politique et sexualité pour réfléchir à l’exil. Sensuel et original.
“La vérité (…), c’est que l’immigrant se sent chez lui dans le sentiment de culpabilité.” Comme le héros de son premier roman traduit en français, Amitava Kumar a fait l’expérience de l’exil.
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Expérience du déracinement et de l’intégration
Elevé dans le nord-est de l’Inde – comme son héros –, il a immigré aux Etats-Unis à la fin des années 1980 pour préparer – comme son héros – un doctorat de littérature comparée. “Je ne parle pas des mensonges que j’ai proférés en effectuant ma demande de visa, complète l’auteur. Je ne songe, en ce moment, qu’à la culpabilité d’avoir abandonné mes parents.”
Comment trouver sa place dans un pays qui n’est pas le sien, n’a de cesse d’interroger le texte
“Autorécit” sensuel et politique, classé parmi les dix meilleurs livres de l’année par Barack Obama, Itinéraire d’un singe amoureux réfléchit aux difficiles expériences du déracinement et de l’intégration. Comment vivre avec la culpabilité du déraciné ? Comment trouver sa place dans un pays qui n’est pas le sien, n’a de cesse d’interroger le texte. A ces questions, Amitava Kumar choisit de répondre d’abord par l’intime et la sexualité.
Quoi de plus universel ? Affirmer son désir, nous dit-il, c’est affirmer son humanité. C’est mettre un pied dans la porte qui mène à la reconnaissance et à la légitimité. Dès lors Kumar, qui écrit “au nom des hordes obscures qui n’ont rien d’autre à déclarer que leur désir”, précipite son double de papier dans un tourbillon de chairs et de passions, chroniquant l’affirmation identitaire de son narrateur au gré de ses histoires d’amour initiatiques.
“J’ai toujours voulu être amoureux »
Il y aura d’abord Jennifer l’ombrageuse libraire, puis l’éclatante Nina puis Cai Yan et puis d’autres encore. Chaque compagne (conquête ?) comme un guide dans la culture occidentale, initiant le jeune immigrant à la musique de Bach et aux concerts de rock, aux fast-foods et au cinéma hollywoodien. Au militantisme et aux études postcoloniales aussi. Car dans cette Amérique agitée par la révolte contre la guerre du Golfe qui s’esquisse, c’est aussi l’apprentissage de la conscience politique que fait ici le héros exalté.
“J’ai toujours voulu être amoureux et je n’ai réussi qu’à raconter une histoire”, conclut l’auteur, prof d’anglais au Vassar College, université de l’Etat de New York, et désormais considéré comme une des plumes de la littérature indo-américaine qui comptent. Ce n’est pas tout à fait juste. Il a aussi trouvé sa place.
Itinéraire d’un singe amoureux (Gallimard), traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Maxime Shelledy, 352 p., 22 €
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