Créée en 1975, l’Ecole des Hautes études en sciences sociales célèbre du 15 au 20 juin ses quarante ans d’existence. Colloques, conférences, rencontres : 5 jours de célébration des idées, pour rappeler combien les sciences humaines résistent à l’air du temps qui voudrait les marginaliser.
Lorsque, en 1975, l’Ecole des hautes études en sciences sociales s’est créée à Paris, boulevard Raspail, les sciences humaines bénéficiaient d’un prestige social et politique difficile à imaginer aujourd’hui. Cet âge d’or des sciences sociales ne fut pas seulement indexé à la qualité des travaux ou à stature des intellectuels qui peuplaient le paysage de la pensée en France (Foucault, Barthes, Derrida, Deleuze, Lévi-Strauss, Bourdieu, Duby, Ricœur…) ; il était aussi directement lié à une demande sociale, comme les ventes importantes des essais l’illustraient à l’envi.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Quarante ans plus tard, l’état de la recherche en sciences sociales s’est reconfiguré, en s’ajustant à la fois à l’esprit d’une époque, rétive aux travaux théoriques, et à la crise financière du monde de l’université (moins d’argent, moins de postes, moins d’échos). Pour autant, dans les marges du débat public dominant, filtré par les écrans médiatiques qui occultent les recherches les plus originales, les sciences sociales bougent encore, réinventent ses objets et modes d’écriture.
Vitalité persistante
L’Ecole des hautes études en sciences sociales est restée, de ce point de vue, l’un des espaces privilégiés de cette vitalité persistante, résistante. L’Ecole accueille ainsi 800 chercheurs, 1 500 étudiants en master, 1500 doctorants, 32 centres de recherche… Sa vocation consiste encore à jouer le rôle d’un véritable “incubateur” de sciences sociales, par la rencontre entre chercheurs, le goût de la pluridisciplinarité, le croisement des disciplines (sciences cognitives et philosophie, poésie et mathématiques…).
La meilleure manière de prendre acte de cette effervescence intellectuelle sera de suivre la semaine de séminaires et colloques organisée à Paris et à Marseille du 15 au 20 juin. L’un des moments forts de cette semaine anniversaire se déroulera lundi 15 et mardi 16 juin à travers un colloque sur “les sciences sociales au XXIe siècle”. Quelles seront les sciences sociales de demain ? Quel sera leur rôle social et politique ? Quelles seront leurs méthodes et techniques d’enquête ? Peut-on parler d’une standardisation des modes de pensée dans le monde ? Comment peuvent-elles redéfinir leur fonction critique ? Autour de nombreuses questions, des chercheurs prestigieux seront réunis : l’anthropologue Arjun Appadurai, le philosophe Etienne Balibar, la sociologue Eve Chiapello, le biologiste Jean-Louis Ameisen, l’historien Kenneth Pomeranz, le sociologue Jean-Louis Fabiani…
Par ailleurs, de nombreuses conférences auront lieu chaque jour, centrées sur des sujets importants : arts, littérature et sciences sociales ; les formes du politique ; les sciences sociales vues d’ailleurs (de Hong-Kong, de Buenos Aires, de Moscou, d’Istanbul, de Niamey…) ; Barthes enseignant ; de l’utilité des sciences sociales, etc. La plupart des rencontres sont en accès libre ; on aurait tort de s’en priver, à condition de croire encore dans la puissance politique du geste théorique des sciences sociales, et de défendre, envers et contre tout, la nécessité de leur regard critique dans l’espace public. http : //40ans.ehess.fr
{"type":"Banniere-Basse"}