Autour d’une foire aux monstres, le dessinateur Alexandre Kha bâtit un récit entre fantastique et thriller.
En périphérie de la ville, dans des terres en friches, un cabinet de curiosités humain attend les amateurs de bizarreries qui, tels le bibliothécaire Arthur et son ami Antoine, cherchent le frisson facile. Momie, femme-araignée, le garçon homard et bien d’autres êtres étranges habitent cette foire aux freaks. Cependant, c’est l’automate Olympia qui focalise le plus les regards des badauds. Non seulement elle est une redoutable championne d’échecs, mais son comportement entretient l’ambiguïté sur sa vraie nature.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
L’onirisme d’un Burton et le réalisme d’un thriller
Après Les Monstres aux pieds d’argile ou Les Nuits rouges du théâtre d’épouvante, hommage au Grand-Guignol, l’auteur lyonnais Alexandre Kha prouve une nouvelle fois son attirance pour l’imagerie fantastique et les bestiaires horrifiques. Mais ses obsessions, il les exprime dans des œuvres qui possèdent plusieurs dimensions. Ainsi, une fois qu’Arthur et Antoine ont déambulé parmi les prétendus monstres lors des vingt premières pages, son récit prend une autre tournure, naviguant entre l’onirisme d’un Burton et le réalisme d’un thriller. Car, en même temps que le secret d’Olympia devient de plus en plus fascinant, des considérations plus matérielles (dettes et loyers impayés) guident certains acteurs-clés.
Une galerie de personnages hétéroclites et des clins d’œil jamais trop insistants
Dans un théâtre d’ombre
Maîtrisant un style épuré, faussement simple, Kha adopte une mise en page imprévisible ainsi qu’une bichromie bleue et grise qui renforce le charme unique de sa narration. Certaines planches se lisent en même temps de gauche à droite et de haut en bas, d’autres donnent lieu à un superbe théâtre d’ombres chinoises.
Nous happant tel un rêve éveillé, son récit repose aussi sur une galerie de personnages hétéroclites et des clins d’œil jamais trop insistants (l’homme-caméléon et l’homme-iguane sont ainsi copiés sur David Bowie et Iggy Pop). Le savant polonais Vasil Kostenko, l’inventeur d’Olympia, fait lui référence au Hongrois von Kempelen, dont la machine joueuse d’échecs reposait sur un trucage. Entre Tod Browning et Philip K. Dick, cet album au charme étrange réussit parfaitement son objectif : il laisse une impression finale délicieuse et irréelle.
Le Sortilège de la femme-automate d’Alexandre Kha (Editions Tanibis), 88 p., 17 €
Lire un extrait
{"type":"Banniere-Basse"}