Après Le Chercheur fantôme, Robin Cousin livre un thriller captivant qui interroge sans manichéisme les enjeux de la technologie dans la sphère privée.
Le cabinet de conseil Jimini s’apprête à commercialiser un nouveau type de lunettes connectées. Grâce aux données qu’elles enregistrent sur la personne qui les porte, elles se muent en coach personnel indiquant comment optimiser son temps et sa vie. Lorsqu’une entreprise de câblage sous-marin, avec laquelle elle travaille, est victime de sabotage, Jimini engage une petite agence de détectives pour trouver le coupable. Chargé de l’enquête, le jeune Gary fait équipe avec son ami d’enfance, Jean Melville, ardent défenseur de l’open source qui se défie de Jimini…
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Avec son thriller Le Chercheur fantôme (2013), Robin Cousin arrivait à rendre passionnante une BD construite autour d’un problème de mathématiques fondamentales et livrait un beau plaidoyer pour la recherche scientifique. Le jeune auteur se penche cette fois sur les nouvelles technologies, leurs possibilités, leur mainmise sur la vie privée, la surveillance généralisée.
Comme dans Le Chercheur fantôme, l’intrigue ne s’efface jamais derrière le propos et Le Profil de Jean Melville est avant tout un polar haletant et très solidement ficelé, plein de suspense et de rebondissements. Grâce à son ingénieux procédé graphique jouant sur le noir et blanc et la couleur, Robin Cousin met en scène le numérique de façon parlante et convaincante. Pour autant, son récit n’est ni froid ni désincarné, et la belle et tragique histoire d’amitié qui lie les héros donne d’autant plus d’intensité au récit.
Trips poétiques
Surtout, Robin Cousin sait parler intelligemment de la high-tech. A la différence de Dave Eggers, qui dans son roman Le Cercle s’était emparé d’un sujet similaire de façon assez schématique, Robin Cousin ne tombe pas dans le manichéisme. Il n’oublie pas que certaines technologies susceptibles d’être employées à des fins discutables peuvent aussi être à l’origine d’expériences fantastiques.
Jean Melville fait ainsi partie d’un collectif de réalité augmentée qui permet d’enregistrer ses souvenirs et de les revoir sous forme de projets artistiques, sources de trips poétiques. Et malgré ses dangers, l’innovation apparaît au final indispensable, puisque c’est grâce à une tablette, une appli et des lunettes connectées que l’enquête sera résolue. Un thriller palpitant et émouvant qui saisit avec pertinence les enjeux de la technologie face aux libertés individuelles.
Le Profil de Jean Melville (Editions Flblb), 216 pages, 23 €
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