Retour aux fondamentaux pour Joann Sfar, qui nous livre la sixième aventure de son fameux “Chat du rabbin”.
Non, Joann Sfar ne laisse pas toutes ses séries en friche. Après avoir fait ses adieux aux héros de Klezmer avec un dernier volume l’an passé, il reprend en cette rentrée son œuvre phare, celle qui l’a propulsé vers les sommets, Le Chat du rabbin.
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Neuf ans après le dernier tome, ce nouvel épisode retourne aux fondamentaux. Le format est classique (54 pages, plus de 80 pour le précédent), la structure de l’album aussi, avec les traditionnelles six cases par planche. Le récit est recentré autour de la famille formée par le chat, le rabbin, sa fille Zlabya et son mari, et se déroule à Alger.
Toujours aussi caustique envers les hommes, la religion…
Le chat, déjà terriblement jaloux du mari de sa maîtresse, est maintenant confronté à la maternité de Zlabya. Pour faire face à ce qu’il considère comme un abandon et trouver une consolation, il s’essaie à la prière. Sans succès. L’animal désespéré finit par quitter le foyer et tente de devenir un chat normal. Un drame – une digression d’inspiration autobiographique mais par ailleurs un peu bancale dans l’album – le poussera à revenir ronronner chez Zlabya.
On sent que Joann Sfar prend plaisir à retrouver l’animal et sa maîtresse – sa tendresse et son empathie illuminent ses protagonistes – et à les dessiner. Son trait flottant, mouvant, changeant de page en page, rend ses personnages plus expressifs, sensuels et attendrissants que jamais. Le chat, toujours aussi caustique, n’a rien perdu de son fiel envers les hommes, la religion…
Doutes et remises en question
Sous cet humour acide, les choses les plus profondes se cachent souvent au détour d’une phrase. Joann Sfar, comme son chat, doute et s’interroge. La relation entre Zlabya et le chat – l’une tout au bonheur de sa future maternité, l’autre rongé par la jalousie – lui donne l’occasion de méditer sur le couple, la déception, la jalousie, l’abandon, le pouvoir des mots, l’incompréhension entre les êtres.
Les doutes et remises en question sont au centre de cet épisode : qu’arrive-t-il quand on perd (ou croit perdre) sa place d’être aimé ? « Et si ce n’était pas moi le centre du monde ? », se demande le chat. Joann Sfar, à travers ses carnets, se livre beaucoup. Pourtant, c’est dissimulés dans cette tragicomédie philosophique que ses questionnements personnels et intimes sont les plus présents et les plus émouvants.
Le Chat du rabbin, 6 – Tu n’auras pas d’autre dieu que moi (Dargaud), 54 pages, 12,99 €
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