La musicienne signe un beau recueil de textes très personnels, hommage à la grande tradition de la poésie américaine des années 1960 et 1970.
Dès ses premiers entretiens, à l’époque du succès de ses singles Blue Jeans ou Video Games, Lana Del Rey ne cachait pas son amour pour le glamour mélancolique, les légendes de Los Angeles et l’écriture poétique de quelques auteurs qu’elle disait vénérer au-delà de tout, à commencer par Allen Ginsberg et Bob Dylan. Ses lectures, en quelque sorte, s’enracinent dans l’Amérique des années 1960, avec leur degré avancé et très âpre de réalisme et de rêveries, de certitudes révolutionnaires et d’intimité débordante.
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À lire les poèmes de la chanteuse, il est évident qu’elle a beaucoup lu Ginsberg, auquel elle emprunte une forme de flux de pensée, de narration presque parlée, comme sortant tout droit de son esprit. Dans ses textes habite quelque chose du journal très intime qui plaira, évidemment, à ses irréductibles fans.
Les mêmes trouveront également dans les photos que Lana Del Rey adjoint aux textes, prises par elle, de quoi percevoir davantage des recoins de son univers, de son labyrinthe mental : ses obsessions pour la topographie californienne, les vastes horizons de Los Angeles et les façons de s’y perdre – physiquement et émotionnellement. Sur le papier, dépouillés de musique, ses poèmes se chargent d’une force vive dans une forme assez belle de dévoilement. Ici, aucun arrangement pour cacher ce qui est dit.
Une lecture qui perpétue la tradition des poètes et poétesses américain·es des années 1960 et 1970
Et les autres, qui ne lui sont pas particulièrement fidèles ? Ils et elles trouveront là une lecture qui perpétue la tradition des poètes et poétesses américain·es des années 1960 et 1970, en écho, par exemple, aux recueils de Richard Brautigan. Le titre même du livre de Lana Del Rey aurait pu être inventé par ce dernier.
Elle est aussi, implicitement, très en phase avec l’écriture de quelques figures peu connues en France, mais très influentes aux États-Unis, telle Anne Waldman, dont les poésies mettent en scène des expériences du quotidien, avec les mots les plus instinctifs possibles, tout en n’omettant jamais une dose de rêverie.
Pour autant, quelles que soient les références qui viennent à l’esprit à la découverte de ces beaux poèmes de la chanteuse, n’oublions pas que ces écrivains et écrivaines ont aussi travaillé dans la durée et que leur œuvre s’est constituée en plusieurs livres, au gré de longues années. Pour suivre les écrits de Lana Del Rey, il faudra que ce premier livre ne soit pas qu’un coup d’essai, et qu’il ne se perde pas au milieu des disques ; il faudra qu’il soit le premier d’une longue série de textes affranchis de la musique.
Violette sur l’herbe à la renverse de Lana Del Rey (Seuil), traduit de l’anglais (États-Unis) par Aurore Vincenti et Cécile Coulon, 160 p., 18 €. En librairie le 4 mars.
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