C’est un sentiment qui prend de plus en plus d’importance dans notre société. Pourquoi ? Comment ? L’essai “Histoire de la solitude – De l’ermite à la célibattante” en analyse l’émergence, heureuse ou malheureuse.
La solitude nous suit “pas à pas”, chantait Barbara, quand Souchon évoquait, lui, “l’ultra-moderne solitude”. Mais faut-il chérir ou craindre cette solitude tenace ? Faut-il lui reconnaître la force de nous donner de l’altitude ou doit-on admettre qu’elle est notre plus grand malheur ? Peut-on choisir entre la solitude tragique et ravageuse de l’absence sans retour et sa forme positive grâce à laquelle on s’accomplit pleinement dans notre intériorité ?
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C’est au cœur de cette tension entre deux façons de la subir et de l’affronter que se place délicatement l’historienne Sabine Melchior-Bonnet. Si son Histoire de la solitude – De l’ermite à la célibattante est plus une étude savante sur l’émergence de ce sentiment comme condition nécessaire à l’accomplissement de soi qu’un travail de réflexion philosophique sur les affres de la solitude, vantée par Montaigne, Rousseau ou Hannah Arendt, Sabine Melchior-Bonnet pose finement les enjeux inextricables de ce qui balance de l’attrait à la répulsion.
Autant un poison qu’une ivresse
Forteresse protectrice ou prison murée, la solitude s’ajuste aux nécessités de chacun·e dans son temps intime. À la solitude du ou de la malade, de l’endeuillé·e, du ou de la déraciné·e, du timide, du ou de la méprisé·e… (“et combien d’autres solitudes quand tombe la nuit”), l’historienne associe, dans un geste symétrique soulignant l’ambivalence de cette émotion, la solitude fière, créative, “enrichie de tous les possibles” comme un contre-modèle à la société. De sorte qu’au fil des chapitres explorant les modalités historiques de ce rapport à soi et aux autres, on mesure combien il est autant un poison qu’une ivresse, et qu’il faut apprendre à doser ses potions, magiques ou maléfiques, au cours de nos vies peuplées.
♦ Jean‑Marie Durand
Histoire de la solitude – De l’ermite à la célibattante de Sabine Melchior-Bonnet (Puf), 320 p., 22 €. En librairie.
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