En mettant en scène des monstres à la Godzilla captifs d’humains, l’Américain bâtit un incroyable récit carcéral.
Electrogor vient juste d’être emprisonné et ne pense déjà qu’à s’évader. Il veut revenir à la maison, retrouver ses deux enfants que son absence doit paniquer. En attendant la bonne occasion, il va devoir s’acclimater aux règles de la vie carcérale, subir le comportement brutal de certains geôliers, choisir son camp dans la guerre des gangs qui règne à l’intérieur.
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Pour survivre, il n’a pas d’autre choix que de se mettre à trafiquer. Sa monnaie d’échange : les poches d’uranium qui naissent sur sa carapace. Car Electrogor n’est pas un homme mais une créature radioactive haute de plusieurs mètres.
Clins d’œil à la culure japonaise
Repéré après sa contribution à Top 10 d’Alan Moore, le dessinateur américain Zander Cannon s’approprie ici les codes de la culture japonaise des kaijū, ces monstres à la Godzilla. Il multiplie d’ailleurs les clins d’œil que les initié.e.s relèveront avec passion. Sa démarche ne constitue pas qu’un hommage au premier degré mais dévoile en cours de route bien d’autres ambitions.
Plutôt que de montrer les monstres comme des menaces, le dessinateur les humanise en leur prêtant des désirs ou une histoire familiale. La réussite de Kaijumax tient au décalage que son trait rond et ses couleurs acidulées créent dès les premières pages.
Non, il ne s’agit pas d’une pochade de science-fiction bis, l’auteur propose en réalité une improbable satire sociale qui, de manière surprenante, évoque davantage la profondeur d’une série télé telle Orange Is the New Black que la simplicité d’un blockbuster saturé d’effets spéciaux.
Un humour mordant et des idées spectaculaires
Pourtant, c’est d’abord un humour mordant et des idées spectaculaires qui servent de moteur à la découverte de cet univers foisonnant et de sa galerie de protagonistes. Mais, suivant une intrigue qui déjoue les attentes grâce à des coups de théâtre venus d’ailleurs, le propos se durcit avec audace sans que l’on n’y prenne garde.
Violence – parfois sexuelle – et addictions sont le quotidien d’Electrogor et des autres monstres, coincés dans leurs cellules-cratères. Il se révèle vite impossible de ne pas ressentir pour eux autant d’empathie que pour les humains qui les gardent.
Kaijumax (Bliss), 360 p., 35 €
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