Hughes Micol lâche la bride à ses visions dans un maelström de folie et de fureur. Tumultes ? Pas mieux.
La carrière d’Hughes Micol a toujours été écartelée entre la tentation du divertissement académique et une forme d’écriture plus libre. Capable d’une grande variété de styles autour d’une ligne reconnaissable, Micol développe une œuvre difficile à tracer, globalement inégale mais toujours capable de susciter, au détour d’une case, la fascination. C’est que l’artiste a le geste habile, naturel même ; certaines de ses images laissent pantois.
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Le seul problème, c’est que lorsque Micol s’ennuie, le trait ne s’en cache pas. Or, ces derniers temps, Micol s’ennuyait, empêtré dans une utilisation de la gouache un peu sage. D’où l’exultation, la jouissance même, de voir l’auteur retourner à son bon vieux pinceau à l’encre de Chine et à son œuvre la plus personnelle, la trilogie Romanji–Séquelles–Tumultes.
Souvent sans queue ni tête, ces intrigues écrites au fil de l’inspiration lui servent de laboratoire où peaufiner son écriture, mais également de prétexte pour accoucher d’images mentales grandioses. Des tableaux qui touchent du doigt le surréalisme et le comics de superhéros dans un même geste, quand ce n’est pas Moebius et Pierre La Police.
Un goût pour l’absurde
Tumultes, tout juste paru, se fait plus dense et plus fascinant que jamais. L’intrigue gagne en logique, le dessin travaille sur le détail et la construction de page, là où les précédents volumes misaient plus sur l’énergie du trait. Enfin, son goût pour l’absurde obéit un peu plus que de coutume au régime de la dramaturgie.
Mais qu’importe ce qu’il raconte, l’essentiel ne tient pas à ces intrigues de science-fiction policières, perdues entre Twin Peaks et Major Fatal. Tumultes, et sa ligne végétale, souple et étouffante, déploie un monde de plus en plus concret et envoûtant, où pèse constamment la menace de l’apocalypse.
C’est une invitation à l’égarement pour le lecteur de passage, et une formidable expérience esthétique pour l’habitué, qui mesure la folie et la fureur visuelles d’un auteur qui n’est jamais aussi ébouriffant que lorsqu’il s’épanouit en toute liberté.
Tumultes (Cornélius), 288 pages, 25,50 €
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